jeudi 11 décembre 2025

1er régiment du Morvan et 1er RVY : des volontaires de l'Yonne dans la 1ère armée française

 

La 2e compagnie du I/Morvan. (Photo parue dans le journal Rhin et Danube).


Le 1er régiment du Morvan

Créé le 25 septembre 1944, le 1er régiment du Morvan est sous les ordres du chef d'état-major des FFI de l'Yonne, le lieutenant-colonel Adrien Sadoul, dit Chevrier, 46 ans. Le capitaine Roehrich en est le chef d'état-major. 

Ce régiment se compose de quatre bataillons. Le 1er est commandé par le capitaine Davannes puis le capitaine Jacques Lintilhac. Le capitaine Charles-Albert Houette, ancien chef du maquis de la Coutelée, est à la tête de la 1ère compagnie, le capitaine Guy Chassin de Kergommeaux commande la 2e (ex-maquis de Merry-Vaux), le capitaine Pierre Escoffier, la 3e. Le 2e bataillon a pour chef le capitaine Gabriel Laventureux, dit Malo, 48 ans. Les deux autres chefs de bataillon ne sont âgés que de 20 ans : Roland Champenier (3e) et Jean Chapelle (4e). Commandant des maquis FTPF de la Nièvre, Champenier a réuni, à Nevers, des combattants de ce département et du Cher. Secondé par le capitaine Léon Wazik, il a pour commandants de compagnies le capitaine Max Thenon, les lieutenants André Ragout et Albert Ciechanski, tandis que la section d'appui est commandée par le lieutenant Jean Vaireaux. Chapelle (Verneuil) commandait la 3e demi-brigade des volontaires de l'Yonne dans la Résistance. Son adjoint, le commandant Camille Recouvreur, qui présente la particularité d'être âgé de 71 ans (il était capitaine depuis 1917), le suit dans l'aventure. La 11e compagnie (lieutenant Etienne Renardet, dit Bernard) de son bataillon correspond à l'ancienne 2e compagnie de la demi-brigade, dont « 50 % des hommes seulement s'engagèrent »

Au total, selon le commandant Chapelle, 1 270 hommes de sa 3e demi-brigade se sont engagés pour former les 2e et 4e bataillons ainsi qu'une compagnie hors rang du régiment. 

Morvan commence à quitter Auxerre pour Spoy (Côte-d'Or) le 1er octobre 1944. Des premiers éléments montent en ligne le 13 octobre 1944 à Miellin (Haute-Saône) où ils relèvent des unités du Corps franc Pommiès. Le régiment est rapidement privé de deux de ses officiers, le sous-lieutenant Georges Buchet, mort de ses blessures le 25 octobre 1944 à Mélisey, et le lieutenant Biessy, dit Bayard, grièvement blessé. 

Pour sa part, la compagnie Bernard quitte la caserne Vauban d'Auxerre le 26 octobre 1944 pour Lure, et prend position deux jours plus tard au Magny, entre Belonchamp et Fresse, sur les cotes 684 et 763. Elle est relevée le 13 novembre 1944.

Le 9 novembre 1944, le commandant Champenier se trouve devant Champagney (Haute-Saône) lorsqu'un éclat d'obus le blesse grièvement. Il décède cinq jours plus tard à Lure. Le 19 novembre 1944, l'adjudant Joseph Flamang est tué également à Champagney.

Dans le secteur du Rouge Gazon 

Le 22 novembre 1944, le régiment se porte en avant, direction le Ballon d'Alsace. Le JMO de la 1ère DMI à laquelle il est attaché précise : « En liaison avec la 3e DIA qui attaque Château-Lambert, le I/Morvan occupe La Rochere après une tentative sans succès sur les Chaseaux ; le IV/Morvan prend Belmont, La Fonderie et La Pille et patrouille jusqu'à la maison forestière de La Pransière ; le II/Morvan s'empare de Miellin, des Landres du Dessus et de la maison forestière de la Verrerie ».

Le lendemain, toujours selon la même source, « le I/Morvan occupe le Lauxey ; ses patrouilles trouvent le contact à la Grange du Harderet et à la Grange Goutte, mais la maison forestière de la Pransière est trouvée inoccupée. Le III/Morvan trouve la cote 1 074 tenue ».

La date du 24 novembre 1944 restera gravée dans les mémoires des volontaires du Morvan. Tandis que le 1er bataillon de la Légion étrangère occupe le sommet du Ballon d'Alsace, les FFI icaunais combattent ce jour-là à la Grange du Harderet, à Château-Lambert, commune du Haut-du-Them. Le capitaine Guy Chassin de Kergommeaux (2e compagnie du 1er bataillon) témoigne : « Je reçus l'ordre de porter ma compagnie en avant et de déloger les Allemands de la route des crêtes. Il y avait un brouillard intense. [...] Nous atteignîmes la route des crêtes, toujours dans le brouillard, sans encombre, et là, nous fûmes matraqués par un tir de mortiers lourds très bien préparé, sous forme de tir d'arrêt sur la route des crêtes, tir qui nous fit de nombreux morts et blessés sans que nous ayons le moyen d'une riposte d'artillerie et de mortiers, notre seule riposte étant nos fusils-mitrailleurs et fusils et grenades. » 

La 2e compagnie a perdu dix tués, dont le lieutenant Claude Yver de La Bruchollerie, secrétaire-général de la préfecture de l'Yonne, et le père Jean-Pierre Klein, aumônier de l'Ecole polytechnique, tué en allant chercher des blessés. 

Au 4e bataillon (Verneuil), des pertes sont également enregistrées lors de cette progression. La 11e compagnie du lieutenant Renardet, partie du  Haut-du-Them, arrive sans difficulté à la maison forestière du Fay, à midi, puis poursuit sa marche en direction de la cote 970. « Il pleut sans arrêt depuis le matin, le brouillard rend la visibilité difficile », note le journal de marche de l'unité. C'est en début d'après-midi que des engagements avec l'ennemi ont lieu. Le caporal-chef Choquenot, « qui a ses habits déchirés par les balles », s'empare d'une mitrailleuse allemande. « A 15 h, la position est complètement nettoyée. Je donne l'ordre de repli », rapporte le commandant de compagnie dont les hommes, au prix d'un tué (Serge Dufour), ont pu faire six prisonniers. 

Ce jour-là, et notamment à la Grange du Harderet, le 1er régiment du Morvan déplore la mort de Gilbert Boite (par mine), André Cherbuy, Maurice Devillaine, Raymond Ducornet, André Guillard, Pierre Hissard, Marcel Jolibois, Lucien Mangin, Jean Michault et Guy Pelletier. 

Le lendemain, une section de la compagnie Bernard reconnaît le fort de Servance, qui est libre, puis, le 27 novembre 1944, reprenant sa progression, arrive à Saint Maurice-sur-Moselle. Le 28, l'unité quitte la commune pour le village de Charbonniers..

Le 27 novembre 1944, d'autres éléments atteignent la croupe du Rouge Gazon (1 100 m) mais rencontrent une résistance en direction du chaume du Rouge Gazon et de la Tête des Neufs-Bois. Une contre-attaque les ramène sur leur base de départ. Le 28, Morvan atteint les chaumes des Neufs-Bois et du Rouge Gazon, mais est stoppé par des feux d'infanterie et de mortier aux lisières Est des bois. Les pertes sont sensibles : le sergent Georges Chauvin, Hubert Colas, le caporal Henri Degoix, le caporal André Gagnepain, le caporal-chef Marcel Thialon ont été tués. Le 29, le régiment parvient à prendre pied sur la tête et le chaume des Neufs-Bois, mais les Allemands tiennent toujours la Tête du Rouge Gazon. Un volontaire, Robert Pralon, est tué par balle, sur le territoire de Saint-Maurice-sur-Moselle. 

Les combats dans ce secteur se porusuivent le 30 novembre 1944, ainsi qu'en rend compte le lieutenant-colonel Sadoul : « Le 2e bataillon tenant l'axe Tête de la Bouloie, Haut du Taye, Tête des Neufs-Bois a tenté une fois de plus de tenir la tête et le chaume des Neufs-Bois. Après de violents engagements, les compagnies engagées prises à partie par de violents tirs de mortier et d'armes automatiques ont dû réoccuper leurs emplacements en lisière des bois. Il a été relevé sur ses emplacements par le 1er bataillon. Le 3e bataillon tenant l'axe les Charbonniers – cote 1150,8 – tête du Rouge Gazon a tenu le contact sur ses emplacements. Il n'a pu déboucher des lisières pour les mêmes raisons que le 1er bataillon. Il a été relevé de ses emplacements par le 4e bataillon. » Pertes du régiment : neuf blessés par balles et mortier, dont un officier au 2e bataillon.

L'entrée en Alsace 

A son tour, le 1er régiment du Morvan entre en Alsace le 2 décembre 1944. Partis de Charbonniers, « nous montons au refuge du Gazon-Rouge par un difficile chemin de montagne et traversons là, la frontière d'Alsace, note le JMO de la 11e compagnie. Après une pause de deux heures, nous redescendons par un chemin abrupt et étroit, couvert de rochers et de glace et parfois dominant le vide... Nous traversons le premier pays alsacien, Storckensohn. La compagnie arrive harassée à Mollau. »

D'autres éléments atteignent Wesserling et Ranspach, tandis que le 2e tabor prend Saint-Amarin. 

Deux jours plus tard, la «11», confiée au sous-lieutenant Fèvre après le départ du lieutenant Renardet, se porte sur Ranspach, au-dessus de la route Remiremont – Mulhouse, non loin du Grand Ballon. Les FFI morvandiaux sont en position face aux Allemands notamment retranchés dans l'usine Pfaffmatt, dont le IV/Morvan ne peut s'emparer. C'est là qu'est tué Robert Bouchet. 

Dans la nuit du 5 au 6 décembre 1944, la compagnie Fèvre repousse une forte patrouille ennemie. Jean Gardebled est tué. Le 8, le tireur FM Ranson est blessé au genou par une balle explosive lors d'une patrouille. Le 9, un tir d'artillerie allemand s'abat sur Ranspach : « Un éclat frappe mortellement le volontaire Buteau Roland en pleine poitrine. Celui-ci succombe quelques instants plus tard dans les bras d'un camarade », note le journal de marche de la compagnie. Il y a d'autres tués au régiment, ce jour-là : Marcel Dagneaux, Marcel Jegado et Jean Vacher, qui appartiennent à la 12e compagnie, ainsi que Louis Florent, tous tués par balle à Ranspach. Relevée le même jour, la «11» quitte Mollau pour Husseren le 10 décembre 1944, puis gagne trois jours plus tard Mitzach. 

Ayant relevé le 1er GTM, le régiment s'apprête à passer l'hiver à Ranspach, Saint-Amarin, Moosch et Mitzach... C'est une période où plusieurs pertes sont enregistrées : Robert Mettendorff, 17 ans, Eugène Balasz (9e compagnie), Roger Frebault (3e bataillon), André Waroquier (4e bataillon), 18 ans, trouvent la mort à Moosch, Henri Bathelier meurt des suites de blessures à Lure. 

Le 25 décembre 1944, de retour de la messe de minuit, le lieutenant-colonel Sadoul, commandant le Régiment du Morvan, est grièvement blessé dans une embuscade. Apprenant cet événement, le capitaine Roerhich, son chef d'état-major, « se jeta le premier avec une mitraillette dans la jeep du lieutenant d'artillerie de liaison. C'est lui qui, le premier, frappa aux portes des maisons, dans la nuit sinistre, trouva celle dans laquelle nous étions réfugiés, veillant le colonel... Cette nuit-là, il nous a sauvés de la capture, peut-être de la mort... » (témoignage du médecin Pierre Scherrer). Sadoul sera remplacé à la tête du régiment par le colonel Pierre d'Esneval (Dinfreville), puis par le commandant Girard, puis - à compter du 14 janvier 1945 - par le chef d'escadrons Louis Montjean, venu des goums marocains.

Le 15 janvier 1945, le régiment, qui a perdu Guy Monchablon tué par balle cinq jours plus tôt, est réduit à deux bataillons de marche, confiés au capitaine Lintilhac et au commandant Jean Chapelle. « Après fusion du 4e et du 2e bataillon, le nôtre devient le 2e bataillon de marche du Morvan, et notre compagnie, de 11e, devient la 8e », note le journal de marche de cette unité.

Le 20 janvier 1945, jour du déclenchement de la bataille de Colmar, une patrouille de la 8e compagnie, qui est en position à Moosch, saute sur une mine : l'adjudant Laramci, le sergent Tomasini et deux soldats sont blessés.

Le 4 février 1945, les soldats allemands abandonnant leurs positions sur les sommets vosgiens, les unités françaises se portent en avant. La 8e compagnie du 1er régiment du Morvan couvre au sud la progression du 24e RI, sur l'axe Geishouse – Schutzen Auberge. « A 9 h, Geishouse est occupé par le 1er bataillon. La 1ère section sous le commandement de l'adjudant-chef Adnot part sur ce village où ils stationnent deux heures environ. Puis poursuivant la progression, la 1ère section repart en direction du Ballon de Guebwiller. Après une pénible ascension, la 1ère section arrive la première au sommet. Dans la journée, nous apprenons que Guebwiller est occupé et que la jonction avec l'armée venant du sud et celle du nord est faite... » Le médecin-capitaine Scherrer confirme ces succès : « Le soir, après une marche épuisante, la route des Crêtes était atteinte. Le 1er bataillon avait fait de nombreux prisonniers au hameau d'Intervogelbach, à l'auberge de Merbeckel et à la ferme de Gels. Le groupe qui avait pris la liaison avec le 2e bataillon à l'auberge de la cote 765 y avait trouvé de nombreuses armes et en particulier une demi-douzaine de mitrailleuses légères en parfait état. Le 2e bataillon avait atteint le village de Geishouse où il avait été reçu par des manifestations chaleureuses. » Pour le 1er Régiment du Morvan, la bataille d'Alsace est terminée. Au moins 53 volontaires ont perdu la vie entre octobre 1944 et février 1945.

Le 19 février 1945, le régiment est dissous pour constituer le 3e bataillon (capitaine Jacques Lintilhac, dit Claude), ainsi que les unités régimentaires du 27e régiment d'infanterie. Avec ce corps, les volontaires de l'Yonne participent à la Campagne d'Allemagne.

Sources principales : journal de marche de la 11e compagnie du 1er régiment du Morvan (archives Stephen Martin) - Pierre SCHERRER, Royal Morvan Infanterie 44, 1990 - Yonne Mémoire n°13, Arory, 2004.

(Collection Arory/Musée de la Résistance d'Auxerre).


Le 1er régiment de volontaires de l'Yonne

Le 7 novembre 1944 est le jour du départ vers l'Est des hommes de l'ancienne 4e demi-brigade de voltigeurs de l'Yonne, devenue, le 2 octobre 1944, 1er régiment de volontaires de l'Yonne (RVY). 

L'unité s'est formée à Joigny avec des hommes issus majoritairement du réseau Jean-Marie Buckmaster. Le commandant Jacques Adam (Roger), 39 ans, est à sa tête. Ses bataillons sont sous les ordres respectifs des commandants Maurice Charpy (un officier de réserve), Pailleret et Marcel Perreault, représentant 1 800 hommes. 

Passant par Vitteaux, Dijon et Auxonne, le 1er RVY arrive à Mottans (Haute-Saône). Le 11 novembre 1944, il monte en ligne dans le secteur de Clairegoutte, où il relève des tirailleurs marocains. C'est d'ailleurs avec le 5e RTM de la 2e DIM qu'il fera corps dans la prochaine offensive...

D'abord, le régiment reste en ligne face aux Allemands, à Ronchamp, Clairegoutte, Frédéric-Fontaine (où est la 9e compagnie du lieutenant Mirondel). Le 17 novembre 1944, il perd au moins neuf tués à Magny-Jobert, Lyoffans, Eboulet et Frédéric-Fontaine, soit à cause des mines, soit à cause des obus : Lucien Brunelle, Jean Charcellay, Marcel Cornu, Henri Dairon, Robert Junod, Désiré Lizakovszky, Pierre Marteau, Robert Matignon, Louis Thibaud.

Le 18 novembre 1944, jour où meurent Albert Labove et Henri Lebeau, la 8e compagnie (capitaine Marcel Poirier) du III/1er RVY, qui était jusqu'alors en ligne à Clairegoutte, nettoie la forêt de Chérimont avant d'entrer, comme d'autres troupes françaises, dans Etobon.

Enfin, le 21 novembre 1944, le régiment se porte en avant. Il va défendre Belverne jusqu'au 25 novembre 1944 ainsi que les positions de Magny-d'Anigon, Fesches-le-Châtel, Allenjoie, Bretagne... 

Le caporal Luc Berton note : « Le 26 novembre, alors que le bataillon patrouille de Novillard à Montreux, le 3e bataillon part en camion pour Sochaux-Montbéliard où il cantonne dans les usines Peugeot. Du 27 au 28 novembre, le 1er RVY nettoie le secteur de Bourogne, Montreux, libérant les villages de Bréchaumont, Chavanne et Foussemagne ». Durant cette période, le RVY déplore de nouvelles victimes : Robert Berluteau, 17 ans, Georges Frécourt, Marcel Bergerac. 

Le 29 novembre 1944, attachés au 5e RTM, les volontaires icaunais entrent en Alsace à Traubach-le-Haut et Traubach-le-Bas, y cantonnent deux jours, puis regagnent Belfort le 1er décembre 1944, avant de reprendre le chemin du front – Soppe-le-Bas – deux jours plus tard... 

Le 3 décembre 1944, en effet, le III/1er RVY, parti de Belfort, est débarqué à Soppe-le-Haut puis gagne à pied Sentheim. Après un long parcours, les hommes arrivent en forêt d'Eichwald. Jusqu'au 6 décembre 1944, sous la pluie glacée et incessante, les Icaunais vont défendre cette position située au nord de Guewenheim, au croisement des routes menant, au nord, à Roderen, à l'est à Michelbach.

Le combat de Michelbach

Le 7 décembre 1944, le 1er RVY s'est vu confier la mission de prendre Michelbach. Dans la nuit, plusieurs hommes ont été faits prisonniers par une patrouille allemande (sergent Trognon, Marcel Chapotin, Georges Husquin, Maurice Labonde, etc.). 

Pour l'attaque, le régiment est soutenu par des chars des 6e et 11e régiments de chasseurs d'Afrique. La préparation d'artillerie est déclenchée à 7 h, l'attaque vers 9 h 30. Caporal dans la 9e compagnie, Luc Berton a longuement raconté ce rude combat, au cours duquel une mitrailleuse lourde et un char Panther causent de lourdes pertes. Les officiers paient le prix fort. A 11 h 30, le commandant Maurice Charpy, un instituteur de 53 ans, est tué. A midi, les commandants Jacques Adam et Marcel Perreault sont à leur tour blessés. Le caporal Berton voit le capitaine Joly, chef de la 8e compagnie, s'élancer avec "un entrain légendaire" malgré son âge. "A 16 h 10, témoigne le vétéran, l'aspirant Vauthier se rue avec ses grenadiers-voltigeurs sur la mitrailleuse lourde qui riposte immédiatement et les massacre presque sur place, sous les yeux horrifiés des gars du PIAT, parvenus à leur hauteur à 30 m à leur droite". L'ordre de repli est donné à 17 h 30.

Le bilan est très lourd : 23 tués et 60 blessés. Outre le commandant Charpy et le soldat Georges Nicole, sont tombés le lieutenant Moïse Flottet (ancien chef du maquis Kléber), l'aspirant Victor Vautier, Jacques Bonnet, Marcel Bouleque, le caporal-chef Auguste Derveloy, Marcel Lacombe, Julien Loyer, Maxime Nadin, Guy Pillot, Robert Roberdeau, Roger Rondelaud, Roland Solmon, Adam Spach, Jean Warren. D'autres soldats, Roger Anquetil, André Boulmier, Henry Bernard, René Coeur-de-Roi, Robert Merandon, Marcel Lebeau, meurent les jours suivants.

Après cet échec, le régiment est relevé le lendemain par le 5e RTM et redescend à Guewenheim pour se reposer, puis part le 13 décembre 1944 pour Roderen où un homme se noie dans la Doller en crue. Ensuite, les volontaires icaunais partent au repos à Anjoutey, près de Belfort, où ils passeront Noël.

28 décembre 1944 : accompagnant le 5e RTM, qui relève le 4e RTM et des éléments du Régiment de Bourgogne, le 1er RVY remonte en ligne à Willer-sur-Thur et Bitschwiller, près de Thann, sur un piton.

3 janvier 1945 : le lieutenant Michel Filloux, 19 ans, est tué par un obus, et Henri Guibert, 21 ans, blessé sur le « Piton sans nom », meurt à Etueffont.  

17 janvier 1945 : le 1er RVY est relevé à Willer-sur-Thur pour rejoindre Bretten.

18-19 janvier 1945 : le 1er RVY s'installe en position dans les secteurs de Bellemagny et de Pont-d'Aspach.

20 janvier 1945 : début de la bataille de Colmar. A cette date, le régiment devient 3e bataillon du 35e RI. A Schweighouse, André Brunet est tué.  

23 janvier 1945 : la 2e DIM parvient à contrôler la route de Thann à Lutterbach. Mais il y a des pertes au 1er RVY (III/35e RI) qui, en forêt de Nonnenbruch, perd l'adjudant Gabriel Jourdan, Guy Sergent et André Garnault, victimes d'un obus.

24 janvier 1945 : le capitaine Jean-Louis Antier (Chevreuil) saute une mine en forêt de Nonnenbruch – il sera amputé. 

En avril 1945, le 35e RI, dont le 3e bataillon reste confié au commandant Perreault, passe le Rhin le 18 avril 1945 et participe à la Campagne d'Allemagne. 

La stèle érigée à Michelbach comporte les noms de 68 volontaires du 1er RVY tombés en 1944-1945. 

Source principale : BERTON (Luc), L'attaque du 7 décembre 1944 de Guewenheim à Michelbach, Archives Arory, 2 F 473, AD 89.

mercredi 10 décembre 2025

La Brigade légère de Garonne (1944) : des FFI devenus artilleurs, dragons et tirailleurs

Des fantassins français dans Scheibenhardt, 19 mars 1945.


Qualifiée, dans ses écrits, de "colonne R4 bis" par le colonel Jean Schneider, commandant du Groupement mobile du Sud-Ouest et du Centre (GMSO), la Brigade légère de Garonne a été recrutée dans le département du Lot-et-Garonne. Officier d'artillerie d'active (il était capitaine depuis 1935), Francis Montagnier, né en Algérie en 1902, en était le chef, sous le nom de guerre de colonel Main Noire

Le lieutenant-colonel Montagnier a dressé, en 1950, la liste des unités qui ont rejoint sa colonne : le Bataillon Chevalier (commandant Jean Crocis, seulement âgé de 23 ans), le Bataillon Jasmin (commandant de réserve Jean Barret, directeur des Services agricoles du département), le Bataillon Coldur (compagnie NL5 du capitaine André Ordy et groupe franc 13 du capitaine Henri Richard) du commandant Joseph Colment, les bataillons FTP Arthur (trois compagnies, capitaine Lucien Baron), Lecerf (commandant Maurice Lecerf) et Prosper (deux compagnies), le Bataillon Geoffroy (brièvement), le bataillon Jack NL 23...

Rassemblés dans le Jura

La plupart de ces FFI quittent le Lot-et-Garonne (Tonneins, Agen, Marmande) les 12 et 13 septembre 1944. Ils se portent d'abord sur La Souterraine (Creuse), puis sur Sancergues (Cher), avant d'arriver à Moissey (Jura) le 2 octobre 1944. C'est notamment le cas du Bataillon Jasmin, 530 hommes environ, dont la 1ère compagnie est commandée par le capitaine André Huser*, la 2e par le capitaine François Cassé, la 3e par le capitaine Jacky O'Brien, la compagnie d'engins Granier par le capitaine Jean Helt. Ce bataillon se disloque durant la deuxième quinzaine d'octobre 1944 : la 1ère compagnie est dissoute le 1er novembre 1944 et son personnel placé en subsistance à la "1ère batterie du 4e groupe d'artillerie divisionnaire" (il s'agit sans nul doute du IV/4e RA), la 2e rejoint le Lot-et-Garonne le 22 octobre 1944, la compagnie d'engins est dissoute le 20 octobre 1944. Il est à noter que parmi les éléments de la colonne qui ont quitté le Lot-et-Garonne, certains - comme le Bataillon Geoffroy - ne sont pas allés plus loin que le Centre de la France et ont fait demi-tour sans rejoindre la 1ère armée française.

Les volontaires qui sont restés dans l'Est rejoignent le camp de Valdahon, dans le Doubs, où s'instruit la Brigade légère de Garonne, forte au 12 octobre 1944 de 3 160 hommes. Commandée par le lieutenant-colonel Montagnier, elle semble alors réunir trois bataillons. 

Le 1er paraît se confondre avec le Bataillon Jasmin qui, nous l'avons vu, s'est disloqué.

Le 2e bataillon est connu parce que sa 4e compagnie correspond - depuis le 30 octobre 1944 - au groupe franc 13 (ex-compagnie NL 13 du Bataillon Coldur). Elle est commandée par le capitaine Henri Richard (Georges), qui est assisté par les lieutenants Marcel Philippon, Adolphe Mathieu, Pierre Alcay, Paul Géraud et Christian Trejaut. Cette unité était partie d'Agen le 12 septembre 1944. Elle était cantonnée à Flammerans (Côte-d'Or) depuis le 10 octobre 1944. Le 4 novembre 1944, elle fait mouvement sur Chatenois.

Le 3e bataillon correspond au Bataillon Chevalier. Il est sous les ordres du commandant Jean Crocis (Jean-Marie), qui a pour adjoints les capitaines Louis Crocis et René Montet. Les trois compagnies sont commandées par le capitaine René Vergniaud, le capitaine Georges Pradel et le lieutenant Jean Baure. 

Destins différents

Progressivement, la Brigade, en tant que telle, disparaît, ses formations connaissant des destins différents. 

Le 1er groupe d'artillerie de la Brigade, sous les ordres du chef d'escadron Jean Bouysse, se transforme ainsi en 4e groupe du 4e régiment d'artillerie (14e division d'infanterie), renforcé par des artilleurs de Corrèze-Limousin et du Tarn.

Le 6 janvier 1945, une autre formation de 500 hommes issue de la BLG - le "bataillon de dragons portés" du commandant Jacky O'Brien, ce dernier issu du Bataillon Jasmin - est affectée au 8e régiment de dragons dont elle forme le 2e escadron (capitaine André de La Salle).

Il subsiste le Bataillon Garonne dit Garonne-Dupré, mis sur pied le 18 décembre 1944 et sous les ordres du commandant Etienne Bloch, dit Dupré, originaire d'Issy-les-Moulineaux, venu du Bataillon Jack NL 23. La CA (capitaine Richard) est formée par la 4e compagnie du 2e bataillon. Le capitaine Lucien Baron, ancien chef du Bataillon Arthur, le capitaine Louis Sahuc, un prêtre issu de la compagnie NL 14, appartiennent également à ce bataillon qui est fort de 850 hommes. 

En Allemagne de vive force

Le 31 décembre 1944, le Bataillon Garonne-Dupré quitte Châtenois pour se porter sur le secteur de Xonrupt (Vosges) afin de relever le 3e régiment de dragons et y tenir position. Le 6 janvier 1945, la 1ère compagnie relève au Grand Valtin des éléments du groupement tactique Bonjour (3e DIA).

Mais le 8 janvier 1945, le bataillon est rappelé pour être dirigé d'urgence sur le secteur Sud de Strasbourg menacé par l'armée allemande. Les Lot-et-Garonnais prennent position sur le Rhin, près de Graffenstaden. Là, ils sont versés dans le 4e régiment de tirailleurs tunisiens (3e DIA) dont ils forment le 2e bataillon, la compagnie Richard devenant CA du II/4e RTT. Mais l'expérience s'avère peu concluante, et tandis que le II/4e RTT est reconstitué, les volontaires du Lot-et-Garonne sont versés dans les autres bataillons du régiment. 

Le 19 mars 1945, la 6e compagnie du capitaine Sahuc, issu du Bataillon Garonne-Dupré, s'illustre en entrant de vive force en Allemagne et en enlevant la localité de Scheibenhardt. Plusieurs Lot-et-Garonnais - Gérard Lescoul, Yves Tricou - sont morts en 1945 dans les rangs du 4e RTT.

* Le capitaine Huser, comme le lieutenant Pierre Gadail (2e compagnie), serviront plus tard au sein du Bataillon Atlantique (III/34e RI) dans le Médoc.

Sources principales : série GR 19 P 47, SHD - archives du 8e régiment de dragons, GR 12 P 109, SHD - archives du Bataillon Coldur, GR 13 P 75, SHD - journal Rhin et Danube.

samedi 6 décembre 2025

De Lorient aux Alpes, le parcours de quelques unités d'origine FFI (1944-1945)


Le 158e RI lors des opérations d'avril 1945. (Collection L. Fontaine).


Poche de Lorient

4e régiment d'infanterie de l'air (RIA). Chef de corps : lieutenant-colonel Henri de La Vaissière de Lavergne, 41 ans. Chefs de bataillon : commandant Charles Judes, 31 ans, et commandant Charles Verrier, 59 ans. 

Forts de 64 officiers, 202 sous-officiers et 798 hommes de troupe, les 1er et 2e bataillons FFI du Loir-et-Cher, mis sur pied à Blois et Vendôme, arrivent en Bretagne le 23 novembre 1944, sous l'écusson récemment attribué de 4e RIA. Dès le 26 novembre 1944, le I/4e RIA (Judes) commence à monter en ligne devant Lorient, dans le secteur de Carnac-Plouharnel. Le lendemain, au cours d'une première patrouille, le capitaine André Larousse, commandant la 4e compagnie, est légèrement atteint au pied, et deux de ses hommes blessés. Le 1er décembre 1944, c'est au tour du II/4e RIA (Verrier) de relever le 71e RI dans le quartier de Nostang. A peine arrivé, le capitaine Michel Malcor, chef de la 7e compagnie recrutée dans la région de Vendôme, décide de prendre la tête d’une patrouille de douze volontaires. Au cours de la progression, l'officier et le sergent Paul Mauricette sont pris sous le feu d'une arme automatique et mortellement blessés. Le 3 décembre 1944, le soldat Guy Allard (13e compagnie du 4e RIA), âgé de 17 ans et onze mois, est tué dans un bombardement sur la route Plouharnel–Erdeven. Le 8, rapporte le JMO de la 19e DI, « une opération a été déclenchée à 8 h 25 par le commandement américain après entente avec le commandement français pour la capture de trois blockhaus allemands (dénommés ouvrages Nuremberg)... Les troupes françaises étaient seulement chargées de la relève des unités d'assaut américaines vers 12 h 15. » L'opération, qui est une réussite, se solde, côté américain, par deux tués, et côté français par cinq blessés. Le 14e bataillon des Côtes-du-Nord et la 5e compagnie du I/4e RIA ont pris part à cette action entre la rivière d'Etel et la rivière de l'Etang. Le 19 décembre 1944, l'état-major du 4e RIA est frappé par une tragédie, à Auray. Un officier FFI qui n'avait pas été autorisé à suivre le régiment en Bretagne abat le lieutenant-colonel Henri de La Vaissière de La Vergne (Valin), chef de corps, et le commandant Charles Verrier, chef du 2e bataillon du Loir-et-Cher, avant de se suicider. Le commandant André Biron prendra le commandement du régiment (qui sera rebaptisé 1er régiment aéroporté ou 1er RAP le 1er janvier 1945), le commandant Henry celui du 2e bataillon (le 25 décembre 1944). Le 7 janvier 1945, « le commandant Judes fait sauter une partie de la gare de Plouharnel » (journal de marche du 4e RIA). Le 24 janvier 1945, au cours d'un accrochage de patrouilles dans Plouharnel, le sous-lieutenant Auguste Le Bon est tué. Le 4 février 1945, la 4e compagnie du 1er RAP occupe Plouharnel. Le lendemain, le 1er RAP apprend qu'il est devenu Corps franc de l'air Valin de La Vaissière (CFAVV), toujours sous les ordres du commandant Biron. Le 23 avril 1945, le CFAVV apprend qu'il est redevenu 4e RIA. Le 10 mai 1945, il entre dans la presqu'île de Quiberon. Pertes totales : seize tués (dont deux officiers). Pour en savoir plus : Les Volontaires de la Liberté. Témoignages et récits recueillis par Raymond Casas, Amicale des anciens du CFAVV, 1982.

Poche de Saint-Nazaire

2e bataillon ORA de la Haute-Vienne (ou 2e bataillon de marche du 63e RI ou Bataillon Patriarche). Chef de corps : chef d'escadrons Raoul Saulnier de Praingy (Patriarche), 45 ans. 

Unité ORA de la Haute-Vienne. Arrive le 18 septembre 1944 devant Saint-Nazaire. Intégré au 1er groupement mobile FFI. Compte trois compagnies (lieutenant puis capitaine René Boileau, dit Berger, capitaine puis commandant Doudies, dit Durbal, capitaine Hubert de Bruchard puis capitaine Maurice Schneberger) et un escadron hors rang. Fort de 20 officiers (dont le capitaine Huyaux), 35 sous-officiers et 420 hommes. Le 21 octobre 1944, un accrochage de patrouilles endeuille le 2e bataillon ORA de la Haute-Vienne dans la région de Frossay, dans le secteur Sud. Le sergent-chef Pierre Lanini, René Gourinchas et Robert Laprade sont tués, le lieutenant Delort et le sergent Bouvier sont blessés. Depuis sa montée en ligne le 18 septembre 1944, Lanini, Gourinchas et Laprade sont les sixième, septième et huitième victimes du bataillon de la Haute-Vienne. Le 1er janvier 1945, ce dernier donne naissance au 1er groupe d'escadrons de cavalerie, qui participera à la recréation du 1er régiment de hussards (officiellement reconstitué le 1er avril 1945 au sein de la 25e division d'infanterie). Une partie de ses éléments passera au 20e RA et au 63e RI. Source : GR 13 P 81, SHD.

Poche de Royan

Demi-brigade de l'Armagnac. Chef de corps : lieutenant-colonel Henri Monnet, 48 ans.

30 septembre 1944 : héritière du Bataillon de guérilla de l'Armagnac - dont le chef dans la clandestinité, le lieutenant-colonel Maurice Parisot, a trouvé accidentellement la mort dans la nuit du 5 au 6 septembre 1944 à Toulouse -, la Demi-brigade de l'Armagnac quitte Bordeaux pour rejoindre le nord de la poche de Royan. Le lendemain, les FFI gersois s'installent sur la rive droite de la Seudre. Le PC du lieutenant colonel Monnet est à Port-d'Envaux, celui du 1er bataillon (commandant Adrien Capin) à Saint-Agnant, celui du 2e (commandant Léon Messin) à Saint-Sornin, tandis que le 3e est en réserve. 14 octobre 1944 : l'Ecole navale stationnée à Clairac (Lot-et-Garonne) rejoint la Demi-brigade de l'Armagnac et cantonne à Crazannes. Elle disposera des canons, mortiers et bazookas de la compagnie d'engins dissoute. 26 octobre 1944 : la Demi-brigade de l'Armagnac est relevée, le 3e bataillon passe aux avant-postes. 27 novembre 1944 : le Bataillon Raynaud du 1er régiment du Gers arrive à Pisany en renfort tactique de la Demi-brigade de l'Armagnac. Fort de 867 hommes qui ont défilé deux jours plus tôt à Auch (Gers), il est sous les ordres du commandant Louis Dorbes puis du capitaine Henri Lussia-Bardou. Le lieutenant-colonel Gabriel Termignon (Thierry), ancien chef de l'AS du Gers, est à la tête du détachement. 5 décembre 1944 : les avant-postes de la Seudre, tenus par le bataillon Messin de la Demi-brigade de l'Armagnac, sont relevés par deux compagnies du Bataillon Raynaud du 1er régiment du Gers. 7 décembre 1944 : les I et II/Demi-brigade de l'Armagnac se regroupent jusqu'au 10 décembre 1944, accueillant des éléments du Bataillon Roland, du groupe Guitton (capitaine Desoncles), du bataillon Heric. 1er janvier 1945 : la Demi-brigade de l'Armagnac et le Bataillon Raynaud du 1er régiment du Gers fusionnent pour former le Régiment Parisot, dont le 3e bataillon, confié au commandant Dorbes, est constitué par le Bataillon Raynaud. Le lieutenant-colonel Termignon devient l'adjoint au lieutenant-colonel Monnet. 16 février 1945 : le Régiment Parisot devient 158e RI. Ce jour-là, le Groupe franc marin Armagnac réalise un coup de main contre le poste fortifié de Mus-de-Loup. 6 mars 1945 : le II/158e RI reçoit le renfort de douze officiers et 350 sous-officiers et hommes de troupe du I/15e RI (Tarn) dissous. 26 mars 1945 : le II/158e RI (commandant Jean Gave) relève les I et III/158e RI sur le front de mer et de la Seudre. Au cours de l'opération, un tir ennemi de 155 tue Yves Célestin et blesse trois hommes appartenant à la 4e compagnie du capitaine Maurice Moreau. 5 avril 1945 : le lieutenant-colonel Monnet présente à ses hommes le drapeau du 158e RI qu'il a reçu le 2 avril 1945 à Paris, lors d'une prise d'armes à Saint-Jean-d'Angle, PC du régiment. 6 avril 1945 : le capitaine Elie Rouby, du Groupe franc marin Armagnac, est grièvement blessé en attaquant un blockhaus lors d'une opération au-delà de la Seudre. Il sera amputé des deux jambes, fait officier de la Légion d'honneur et Compagnon de la Libération. Le sergent Lamargot et le caporal Robert André ont également été blessés. Intégré avec le 50e RI (ex-Brigade Rac) dans la Brigade Oléron. Prend part aux opérations du 16 au 18 avril 1945 devant Royan. Lors du franchissement de la Seudre (16 avril 1945), perd notamment le lieutenant André Nicolas, l'aspirant André Bonay, le sous-lieutenant Jean Sizabuire, le commandant Maxime Célérier de Sanoy, chef d'état major du régiment. Participe ensuite à la conquête de l'île d'Oléron (30 avril-1er mai 1945). Source principale : GR 12 P 26, SHD. Pour en savoir plus : Le Bataillon de guérilla de l'Armagnac. 158e RI, CTR Editions, 1997.

Poche du Médoc (Pointe de Grave)

2e régiment d'infanterie du Lot. Chef de corps : lieutenant-colonel Robert Noireau (Georges), 32 ans. Mis sur pied à Toulouse (caserne Niel) avec des volontaires du Lot.

26 octobre 1944 : le I/2e RI du Lot accompagné du commandant Amable Le More arrive dans le Médoc et cantonne à Cissac. 15 novembre 1944 : le 2e RI du Lot relève les Bataillons d'Arcachon, Claverie, Georges et Doussy, ainsi que l'Escadron Klein. 18 et 19 novembre 1944 : le II/2e RI du Lot (capitaine Larribère puis capitaine Parrot), parti de Toulouse les 8 et 9 novembre 1944, monte en ligne. 5 janvier 1945 : l’unité portant l'appellation d'"escadron du 3e bataillon du RI du Lot" arrive en renfort dans le secteur. Il relève des éléments de la 3e compagnie. 10 janvier 1945 : un tir ennemi sur Vendays cause la mort de cinq militaires du 2e RI du Lot : le sous-lieutenant Paul Lesueur, Perez Martino, Robert Landrin, Adolphe Gosio et Georges Salvat, âgé de 15 ans et deux mois (il est né le 6 novembre 1929 à Blida, en Algérie). 29 janvier 1945 : une patrouille du 2e RI du Lot saute sur une mine à Vendays. Trois morts : le lieutenant André Gaussinel, l'adjudant Charles Bebengut, Joseph Azorin. Quatre blessés dont le capitaine Gilladie. 5 février 1945 : une équipe de déminage du 2e RI du Lot saute sur une mine sur le territoire de Vendays-Montalivet. Lourd bilan : six morts dont trois officiers, le commandant Jean-Marie Brouel, 32 ans, le sous-lieutenant Robert Eroles, le sous-lieutenant Robert Delsahut, et les soldats Pierre Garoux, Mauront, A. Benhallah. Il y a également cinq blessés. 1er mars 1945 : arrivée du III/2e RI du Lot (capitaine Roger Sol) dans le Médoc. 2 mars 1945 : attaque allemande du blockhaus n°2 à 7 h 15, « après une violente préparation d'artillerie et un tir nourri de mortier ». Compte-rendu des FFI du Lot : « La liaison téléphonique avec ce poste est immédiatement coupée et les éléments qui occupent ce blockhaus sont isolés du reste du dispositif de défense. Le combat, violent, dure une heure et demie environ. A 7 h 30, la section Bretagne est attaquée. Les armes automatiques tirent pendant une dizaine de minutes. Un des groupes est capturé. Ce qui reste de la section se replie direction sud-est. Un peu plus tard vers 10 h, l'ennemi (une trentaine d'hommes) se présente devant les postes tenus par les deux groupes de la section Ninu. Un combat violent s'engage. L'ennemi laisse deux morts et un blessé sur le terrain. La fusillade dure une heure et demie. Le calme revenu, le blessé allemand (aspirant de marine) est ramené dans nos lignes. Les deux cadavres ennemis seront ramassés le lendemain au cours d'une mission de nettoyage... » Le calme est revenu, mais cette affaire aura coûté au 2e RI du Lot un tué (le soldat Henri Bareilles) et 40 prisonniers (dont le lieutenant Donnadieu, le sous-lieutenant Merle et neuf sous-officiers), notamment à la CAB 2 et à la 5e compagnie du lieutenant René Castagné. De son côté, la compagnie Bretagne déplore un blessé et neuf disparus. Le 2e RI du Lot devient 154e régiment de génie d’assaut à compter du 1er avril 1945. Du 14 au 20 avril 1945, il prend part aux opérations de la Poche du Médoc (I/154e RGA du capitaine André de Gaudusson,  II/154e RGA du capitaine Parrot, III/154e RGA du capitaine Sol). Prend l'écusson du 8e RI à compter du 1er mai 1945. Pertes totales sur le front du Médoc : 72 tués (d'après l'ouvrage Une brigade FFI au combat). Source principale : archives du 2e RI du Lot, SHD, GR 13 P 81. Pour en savoir plus : Le Front du Médoc. Une brigade FFI au combat, 1989.

1ère armée française

Groupement de Genouillac. Chef : capitaine Alain de Verdier de Genouillac (Galiot), 31 ans. C'est une unité de l'AS de l'Aveyron, qui correspond à une compagnie du 1er Bataillon de l'Aveyron (Bonnafous) de la Brigade légère du Languedoc. A la disposition de la 3e DIA depuis le 9 octobre 1944, ce petit maquis passe au 2e groupement de tabors marocains (GTM), dont il forme un corps franc de 50 hommes attaché au 1er tabor. Son chef, le capitaine Galiot, décède le 6 novembre 1944 des suites de blessures, à Thiéfosse (Vosges). Auparavant, le sous-lieutenant Emile Lafon est tombé le 24 octobre 1944 à Cornimont.

Commando Hermine, dit Commando des Hautes-Alpes. Chef : lieutenant-colonel Jean Drouot (Hermine). La 2e DIM s'est vue rattacher la soixantaine de « commandos » des Hautes-Alpes partis le 20 septembre 1944 combattre aux côtés du 4e RTM. Ils appartiennent aux commandos Bir-Ackeim (sic) du sous-lieutenant Grospiron, Valmy de l'aspirant Georges Hery, et au détachement du lieutenant Paul. Le Commando Hermine, qui perd deux blessés par mines dans le bois de Palante, le 7 novembre 1944, est toujours affecté à la 2e DIM à la date du 30 novembre 1944. Le 1er décembre 1944, il participe à l'opération du 4e RTM en direction de Thann. Le commando quitte ce régiment avant la mi-décembre 1944. Dans un rapport daté du 15 décembre 1944, le chef de corps du 4e RTM se loue de l'efficacité de l'unité FFI, "excellent élément" qui a participé notamment aux opérations dans le secteur de L'Isle-sur-le-Doubs et Lure, "le nettoyage de Belfort, les affaires des vallées de la Thur et de la Doller". Encadré par dix officiers et 25 sous-officiers et caporaux, le commando a déploré "des pertes très sévères en cadres et en hommes - deux-tiers de son effectif", souligne le chef de corps du 4e RTM. Les éléments du lieutenant Paul reviennent notamment à Valence en décembre 1944 pour rejoindre le 159e RIA.

Groupe d'escadrons Thiolet. Chef de corps : chef d'escadrons Gaston Thiolet. Il est composé de militaires de la Garde. Mis sur pied le 29 août 1944, il a pris part aux combats d'Auvergne puis, rattaché au groupement Roussel (lieutenant-colonel Colliou) de la Division légère d'Auvergne, il est mis à disposition de la 1ère DB le 4 octobre 1944. Le général de Monsabert, qui a reçu le 2 octobre 1944 le commandant Thiolet à son PC de Rougemont, parle d'un « bataillon Thiollet (sic) ». Le 7 octobre 1944, il est engagé aux confins de la Haute-Saône et des Vosges. Tandis que l'escadron moto 3/4 a été détaché auprès d'un escadron du 3e RCA, le chef d'escadrons Thiolet dispose des escadrons 1/2 (capitaine Beller, dont un peloton de l'escadron 3/3), 3/2 (capitaine Nay) et 3/5 (capitaine Rabot), ainsi que d'un char, pour attaquer en direction du fort de Château-Lambert. Au cours des combats, un officier, le sous-lieutenant Philippe de Jarnieu, est grièvement blessé. Le groupement se replie et s'installe sur place pour la nuit. Il déplore trois tués (le maréchal-des-logis chef Jules Delpuech, les gardes Raguel-Appolinaire Hugues et Henri Bachelet) et 19 blessés (dont le garde Christian Montsarrat, mort à l'hôpital de Lure). Le lendemain 8 octobre 1944, journée qui voit le col du Mont de Breucheux occupé, le garde Henri Malmartel (escadron 3/3) est tué, cinq hommes blessés. Au 9 octobre 1944, une avance d'un peu plus de 1 km a pu être réalisée par les gardes, permettant la capture de huit soldats allemands. Le colonel Durosoy, de la 1ère DB, louera, dans une note, « la magnifique tenue des gardes » de Thiolet. « Le 10 octobre, précise le chef d'escadrons Thiolet, deux contre-attaques lancées contre les positions tenues par le 3/5 sont repoussées ; l'escadron est soumis à un tir de minen, d'artillerie et de chars nourri et meurtrier. » Le garde Lucien Grandjonc, du 2/2, est tué, le garde Robert Boscher, du 3/5, succombe à ses blessures. Puis les gardes vont tenir position, notamment à Ramonchamp, sous la pluie, faisant six prisonniers mais perdant dix blessés. Les trois escadrons ne seront relevés qu'à partir du 17 novembre 1944 par des éléments du Corps franc Pommiès. Félicité par le colonel Delange, de la 1ère DMI à laquelle il était rattaché, le groupe quitte le Nord-Est pour Paris le 20 novembre 1944, après avoir perdu sept tués et 35 blessés durant les opérations des Vosges. Source : GR 13 P 93, SHD.

Bataillons XII/22 et XXVI/22 

La consultation des archives du 3e groupement de choc permet d'apporter d'utiles - quoique confuses - précisions sur les volontaires parisiens ayant rejoint, durant l'hiver 1944-1945, cette formation militaire commandée par le lieutenant-colonel Régis Bouvet. A l'origine, le gouvernement militaire de Paris fait état d'une demande, formulée le 4 novembre 1944 par le ministère de la Guerre, de diriger 800 volontaires de la capitale sur Salins (Jura). Destinés au Groupe de commandos d'Afrique (GCA), ils proviennent du bataillon XXVI/22 cantonné au Mont-Valérien, fort de 33 officiers, 107 sous-officiers et 512 hommes de troupe, ainsi que des dépôts de Paris et de Versailles. Selon le journal des marches et des opérations du GCA, tandis que le commando du capitaine Antoine Huc, mis sur pied avec des Parisiens, devient 4e commando de ce groupe, le renfort de Paris provenant du bataillon de sécurité XXVI/22 "Mont-Valérien" - issu du Bataillon Hoche - et du bataillon XII/22 "Château de Madrid" est placé, le 18 décembre 1944, sous les ordres du chef de bataillon Rigaud. Il est alors désigné sous le nom de "Bataillon Paris", dont les trois premières compagnies sont sous la responsabilité du commandant Fiévet, chef du bataillon XXVI/22, les deux autres sous celle du commandant Fernand Raux alias Désiré, issu du bataillon XII/22. Ce bataillon d'origine FFI est cantonné à Malvaux, Lepuix et au Mont-Jean, et il est notamment encadré par les capitaines Daniel et Quenot. Le 18 janvier 1945, selon le JMO du Groupe de commandos de Provence, le chef d'escadrons de Courson est placé, au sein du 3e groupement de choc, à la tête d'un "groupement de commandos" composé du commando du capitaine Devoluet (ex-Groupe de commandos de Provence), du commando du commandant Raux (ex-Bataillon Désiré) et de deux commandos du commandant Fiévet (ex-Bataillon Hoche). Deux jours plus tard, ce groupe de commandos est engagé dans la bataille de Colmar, au cours de laquelle Raux est blessé. Il devient 6e bataillon de choc qui, à la date du 1er mars 1945, est composé du 5e commando (capitaine Juvénal puis capitaine de Barberin), du 6e commando (capitaine Devoluet puis capitaine Quenot), du 7e commando (lieutenant Lacharme puis capitaine Mison), du commando d'accompagnement (capitaine Pierre-Rom). Source principale : GR 12 P 96, SHD.

Front des Alpes

Bataillon des Hautes-Alpes. Chef de corps : chef de bataillon Léon-Louis Terrasson-Duvernon, 45 ans. Mis sur pied dans la deuxième quinzaine du mois de septembre 1944 à Embrun, le Bataillon des Hautes-Alpes ne réunit, à l'origine, que deux compagnies confiées au capitaine Marcel Tortel et au lieutenant René Eymin, ainsi qu'une compagnie de commandement. Ancien commandant de l’école de ski et de montagne de Lus-Sainte-Croix, le commandant Terrasson-Duvernon est à la tête de cette formation qui reprendra, elle aussi, les traditions du 11e BCA. Elle commence à faire mouvement le 27 septembre 1944 vers Saint-Véran, dans le Queyras. Deux jours plus tard, une première reconnaissance est menée au col de Saint-Véran par une section de la 2e compagnie (lieutenant Eymin) et par des éléments de la compagnie Braillon. Le 1er octobre 1944, le bataillon s’enrichit de deux nouvelles compagnies (les 3e et 4e) formées par le Bataillon "Chant du départ" dissous. Le 11 octobre 1944, il déplore son premier tué. C’est un officier, le lieutenant André Mermet, de la 1ère compagnie, qui, grièvement blessé sur une mine, avait été hospitalisé à Guillestre puis à Briançon. Le 3 novembre 1944, le Bataillon des Hautes-Alpes est relevé par le 1er bataillon du Jura et retourne à Embrun, où il va se reformer. Le 18 décembre 1944, deux nouvelles 3e et 4e compagnies sont mises sur pied avec le Bataillon XVII/15 dit des Maures. Enfin, l'unité recevra une compagnie du 2e bataillon FFI du Rhône. Ainsi recomplété, le bataillon XI/15 (11e BCA à compter du 1er février 1945) remonte en ligne le 10 janvier 1945 et relève le I/159e RIA – l'ancien bataillon du Jura. Le 7 février 1945, avec 160 skieurs, le commandant Terrasson-Duvernon mène une reconnaissance profonde sur Abriès, qui doit être occupé, Ristolas et le col de la Croix. C'est l'élément du capitaine Vollaire qui est accroché. Journal de marche du 11e BCA : « Devant le tir meurtrier des Allemands et n'ayant plus de munitions, le capitaine Vollaire, à 12 h 30, donne l'ordre de repli. Il est en effet impossible d'envisager une opération offensive ; l'ennemi est solidement retranché dans le village qui donne l'impression d'être organisé solidement. Le repli est couvert par la 2e compagnie. Il est très difficile, le terrain étant en grande partie découvert. Les Boches font du tir à tuer. » Les chasseurs Félix Metailler, 19 ans, et Marc Ollivier, 18 ans, sont tués et laissés sur le terrain, les chasseurs Pierre Galland et Auguste Pellissier mortellement blessés. Le 20 mars 1945, le 11e BCA "bis" est dissous, une partie de ses hommes forment la 2e compagnie (lieutenant René Eymin) du 11e BCA. Source : "Historique du Bataillon des Hautes-Alpes", GR 12 P 30, SHD.

141e régiment d'infanterie alpine. Chef de corps : lieutenant-colonel Carrias puis lieutenant-colonel Dusseau.

Le I/141e RIA a été recruté dans le Vaucluse. Il a été créé le 23 septembre 1944 sous le nom de Bataillon XIV/15, six compagnies sous les ordres du commandant Claude Bonfils, 52 ans, qui avait commandé, dans la Résistance, une compagnie de l’AS Drôme puis un bataillon de FFI du Mont Ventoux. Parti le 13 décembre 1944 pour Barcelonnette, le bataillon monte en ligne deux jours plus tard, d'abord deux compagnies (la 2e du capitaine Bertrand, la 5e du capitaine Duriau) dans les secteurs de Lans et de la Bayasse. Il perd un tué, le sergent André Dardaillon, le 29 décembre 1944. C'est le 24 février 1945 qu'à compter du 1er du mois, il prend l'écusson de I/141e RIA, régiment - à deux bataillons - reconstitué non dans le cadre de la 27e DA, mais celui de la 15e région militaire de Marseille.

Le 2e bataillon du régiment, stationné dans le quartier de Guillestre, correspond à l’ancien 4e bataillon du 159e RIA, le bataillon Ravel qui avait quitté l'Ardèche pour Embrun le 5 octobre 1944 et tenu la ligne Vars – col de Vars. Le II/141e RIA perd plusieurs tués le 14 avril 1945 au col Agnel : Denis Leyronnas, Marcel Provost... Le lieutenant Julien, chef d'une SES du régiment, y est fait prisonnier.

Les 22 et 23 avril 1945, le I/141e RIA, dont le commandement est assumé provisoirement par le chef de bataillon Alphonse Dumay - le commandant Claude Bonfils exerce en effet la responsabilité du régiment - prend part aux opérations de Roche-la-Croix. Source principale :  GR 12 P 24, SHD.