vendredi 13 juin 2025

Les Poches de l'Atlantique : un meurtrier quotidien pour les combattants français, septembre 1944 - mai 1945

Source photo : La Coupole, Centre d'histoire. 


 

   Entre septembre 1944 et mai 1945, le quotidien des combattants français des Poches de l'Atlantique, avant et pendant le lancement d'offensives contre plusieurs réduits (Royan, Pointe de Grave, La Rochelle), a été constitué de combats de patrouilles, de bombardements, et même parfois d'attaques et de contre-attaques. Voici plusieurs exemples parmi d'autres d'opérations souvent meurtrières, sur la foi de rapports conservés par le Service historique de la Défense. 

21 septembre 1944. Royan, Bataillon de marche Pierrot (Dordogne). "Une patrouille de six hommes partie à l'aube se heurte à une formation allemande aux environs de Semussac. L'un d'eux, Jean Montès, est tué net. Après un bref repli, son camarade Guérin Martel, malgré un violent feu de mitrailleuse dirigé contre lui, revient chercher le corps et le ramène à l'arrière".

21 octobre 1944. Saint-Nazaire, 2e bataillon ORA de la Haute-Vienne. "La section du sergent-chef [Pierre Lanini] poussait une reconnaissance dans les lignes ennemies. Après avoir pris, le matin déjà, un violent contact avec l'ennemi, il s'apprêtait à prendre le chemin du retour, lorsqu'un détachement ennemi important le prit à parti. Sans hésiter le sergent-chef [Lanini] fit front. Lui-même prit le commandement de l'arrière-garde avec une dizaine de ses braves et donnant au reste de sa section l'ordre de se replier [...] Les renforts ennemis ne cessaient d'affluer et eux luttaient à 1 contre 20 [...] Ils résistaient pendant trois heures [...] [Lanini], continuait de faire face, dirigeant et encourageant les siens de son exemple et de son ardeur. Blessé une première fois à l'épaule gauche, il continuait de tirer et de diriger les siens. Bientôt, une balle en plein coeur le frappait à son poste de combat. [Gourinchas] [...] maintenait le courage et la confiance de ses camarades. Une balle en pleine tête l'a cloué sur l'emplacement qu'il ne voulait pas abandonner. Enfin [Laprade] fut atteint d'une rafale de FM allemand. Blessé grièvement, il ne devait pas tarder à mourir..."

25 novembre 1944. La Rochelle, 93e RI (Vendée). "Les Allemands au nombre de 5 à 600 ont attaqué par surprise à 500 ou 600 m en arrière de notre poste du Pavillon après avoir progressé durant la nuit et pris position à proximité de nos lignes. [...] A l'heure actuelle les Allemands ont évacué Le Pavillon. Cette évacuation a été constatée par le commandant l'Hélias lui-même accompagné du capitaine Heliet du corps franc du lieutenant Claude. Au cours de cette patrouille faite sur la rive Ouest du canal, côté Pavillon, trois Français décédés ont été découverts dans les roseaux de la rive opposée du canal. Ces cadavres ont été ramenés à la nage sur la rive Ouest..."

10 décembre 1944. Lorient, II/118e RI (Finistère). "Les Allemands se massent en force en avant de 116. Bombardement de toute la ligne. Diversions aux deux ailes. Assaut de 116 après être entrés à Brémelin. Un poste FM est encerclé mais tient bon. J'envoie une section de renfort. L'assaut est enrayé, l'artillerie américaine tire et disperse l'ennemi qui bat en retraite. A 10 h, tout rentre dans l'ordre. La 5e compagnie sous les ordres du capitaine Lautridou s'est parfaitement comportée ainsi que la CA 2 (capitaine Le Gars). Nous avons trois morts et six blessés. [...]"

27 décembre 1944. La Rochelle, 108e RI (Dordogne). "Mission : reconnaître les positions ennemies aux abords d'Aigrefeuille. [...] Le contact est pris à Bois-Gaillard. [...] Le sous-lieutenant Granier et quatre hommes, avec un FM, sont pris sous le feu de mitrailleuses ennemies. Les quatre hommes sont tués ou blessés. Le reste de la patrouille ouvre le feu sur les postes ennemis. L'accrochage dure deux heures sur les Rivières. Une centaine d'Allemands suivent à distance, parmi eux des miliciens en uniforme ennemi donnent des ordres en français."

2 janvier 1945. Saint-Nazaire, 17e BCP (Indre). "Malgré le tir américain les Allemands continuent à s'approcher et font sauter 19 mines ou grenades disposées devant nos lignes. Des cris en allemand sont entendus (tels que "cochons de Français", "salauds", etc.), des ordres continuent à être donnés : "appuyez à gauche, avancez la mitrailleuse", etc. Le tir américain les suit dans leur progression jusqu'à 150 m de nos lignes où ils s'arrêtent à une haie d'intervalle de nos postes. Sur ordre nos hommes ouvrent brutalement le feu sur l'ennemi. Une mitrailleuse lourde les prend en flanquement. Un combat très âpre s'en suit."

14 janvier 1945. Saint-Nazaire, 8e cuirassiers. "17 h 30. Embuscade du 1er escadron sur la route Chauvé - Vue à l'ouest du Poirier (40 hommes et 9 FM). La patrouille de pointe est prise sous un feu convergent d'armes automatiques ennemies qui sont repérées à l'ouest de la ferme Sainte-Anne. La patrouille décroche. Un tué : l'aspirant Calvel qui s'était audacieusement porté en avant de ses éclaireurs pour les guider à proximité des postes ennemis. [...]"

7 février 1945. Saint-Nazaire, 8e cuirassiers. "15 h 30. Au cours d'une reconnaissance de terrain, le lieutenant de Lafayette est mortellement atteint par une mine. Le capitaine de Champsavin et le sous-lieutenant Jacquemin sont grièvement blessés".

8 février 1945. Saint-Nazaire (devant Le Thénot), 63e RI (Haute-Vienne). "Au moment où les quatre éclaireurs arrivaient à hauteur des premières maisons du village, l'ennemi ouvre un feu extrêmement violent sur l'ensemble de la section. [...] Riposte rapide [de] toutes nos armes ; le tir précis de nos FM oblige les armes automatiques ennemies à changer de positions. A ce moment, je reçois une liaison du 2e groupe, me prévenant que quatre hommes dont le sergent-chef [Tolari] étaient hors de combat ; de même au 1er groupe, le chargeur du FM est tué à son poste. Un homme est tué quelques secondes plus tard. [...] J'ai donné l'ordre de repli immédiat."

15 février 1945. Lorient, 71e RI (Côtes-du-Nord). "Le corps franc du 2e bataillon sous le commandement du lieutenant Boulanger ayant pour mission de reconnaître la route Locmaria-Bréhigair se heurte aux résistances avancées de l'est de Locmaria. La patrouille est prise sous le feu de deux mitrailleuses ennemies qui se sont brusquement révélées à 50 mètres. Le sergent Julou Pierre a été tué. Le soldat Brual Hyacinthe a été mortellement blessé en se portant au secours de son sergent. Il est mort pendant le retour de la patrouille. Le corps franc n'a pu se décrocher qu'au bout de deux heures avec l'appui des mortiers et de l'artillerie américaine."

21 février 1945. Saint-Nazaire, III/67e RI (Picardie). "Au cours de la soirée à 16 h, une de nos patrouilles commandée par le lieutenant Renard est attaquée par des tirs isolés ennemis, puis par une mitrailleuse légère et un FM. Trois hommes sont blessés au cours de cet engagement. La patrouille rentre dans nos lignes, protégée par un groupe de la 1ère compagnie ayant à sa tête le lieutenant Spicer qui s'était porté en renfort. Sept Allemands furent tués dans cette escarmouche. Blessés : Lejard Gabriel, sergent 3e compagnie, Vanservenant Roland, sergent-chef 5e compagnie, Melin Louis, caporal 5e compagnie. Le sergent Lejard et le caporal Mélin sont cités."

25 février 1945. Dunkerque, I/67e RI (Picardie). Citation à l'ordre de la division du sous-lieutenant Roger Vigoureux (3e compagnie) : "Jeune officier actif et plein d'entrain. Le 25 février 1945 sur le front de Dunkerque a volontairement accompagné les brancardiers et a été blessé en essayant de ramener le corps d'un sous-officier tombé dans les lignes ennemies."

2 mars 1945. Médoc, II/2e régiment d'infanterie du Lot (attaque du blockhaus n°2) : "La liaison téléphonique avec ce poste est immédiatement coupée et les éléments qui occupent ce blockhaus sont isolés du reste du dispositif de défense. Le combat, violent, dure une heure et demie environ. A 7 h 30, la section Bretagne est attaquée. Les armes automatiques tirent pendant une dizaine de minutes. Un des groupes est capturé. Ce qui reste de la section se replie direction sud-est. Un peu plus tard vers 10 h, l'ennemi (une trentaine d'hommes) se présente devant les postes tenus par les deux groupes de la section Ninu. Un combat violent s'engage. L'ennemi laisse deux morts et un blessé sur le terrain. La fusillade dure une heure et demie. Le calme revenu, le blessé allemand (aspirant de marine) est ramené dans nos lignes. Les deux cadavres ennemis sont ramassés le lendemain au cours d'une mission de nettoyage."

5 mars 1945. Saint-Nazaire, 67e RI. "Au cours du repli d'une patrouille effectuée par la 11e compagnie, sous le commandement du sous-lieutenant Blanjoue, le soldat Lourdet André est tué et les soldats de 2e classe Massaux et Cottez sont mortellement blessés par des rafales d'armes automatiques ennemies. Ces blessés sont évacués sur l'hôpital de La Ferverie".

17 mars 1945. Médoc, Bataillon Atlantique du Lot-et-Garonne. "Dans la soirée du samedi, des éléments ennemis s'infiltrent dans nos lignes avec l'intention évidente de couper une ligne téléphonique. Une patrouille sous les ordres du lieutenant Graille rentre en contact avec ces éléments en même temps qu'une seconde commandée par le sergent Fournet. Si le fusil mitrailleur fut employé avec abus au cours de ce combat, le courage de nos hommes n'en reste pas moins évident. Le lieutenant Graille, blessé au genou, fut transporté à l'infirmerie de Queyras et évacué par la suite sur l'hôpital de Lesparre".

19 avril 1945. Saint-Nazaire, II/32e RI (Indre-et-Loire, Loire-Inférieure...). "Pendant le jour, actions de tireurs isolés sur nos avant-postes. A 15 h 30, le soldat Guimard est blessé à la tête par une balle (7e compagnie). A 13 h, l'adjudant Houdeille de la 6e compagnie est blessé mortellement en procédant à l'essai de grenades allemandes. Le soldat Le Moine qui se trouvait à proximité est blessé par un éclat à la cuisse. 6e compagnie : à 21 h 30, le sergent Lhermie Gaston, les soldats Montiège* Marcel et Grolleau Georges sont blessés par une mine inconnue en posant des barbelés. Le soldat Bonneau Gabriel (7e compagnie) est blessé par trois balles de mitraillettes à son créneau. [...]". *Décédé le 20 avril 1945. 

28 avril 1945. Saint-Nazaire, 67e RI. "Une patrouille de la 7e compagnie effectue sous les ordres du lieutenant Dupuis une reconnaissance des rives du canal. Elle est sérieusement accrochée par des armes automatiques ennemies. Une patrouille est envoyée parle chef de bataillon pour les dégager. Sont blessés le lieutenant Dupuis, le caporal-chef Minet, les soldats Poupart et Choquart. Ils sont transportés à l'hôpital de Gavre. Le lieutenant Dupuis décède dans la nuit des suites de ses blessures".

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire