mardi 26 avril 2011

Les "Bara" de 1944



Ci-contre : Dans cette page publiée par la Ville de Paris, la fameuse photo montrant la rencontre entre le général de Lattre et Serge Gras, mort en héros en Allemagne à l'âge de 16 ans.

Il est peu de dire que la période post-Libération fut des plus confuses. Les exemples qui en témoignent et qui concernent notamment les unités FFI ne manquent pas. Ce sont deux régiments portant le même écusson qui sont mis sur pied au même moment dans des régions différentes (ainsi, le 51e RI, constitué à la fois dans le Nord-Pas-de-Calais et dans le Tarn et l’Aveyron, ou le 26e RI, en Meurthe-et-Moselle et en Dordogne)… Ce sont des individus au passé obscur qui parviennent à prendre la tête d’unités FFI – avant d’être rapidement démasqués… Des FFI d’origine italienne ou polonaise, mais venus très jeunes en France, qui servent durant plusieurs mois aux côtés de leurs camarades, avant que l’état-major ne se rende compte qu’ils ne sont pas Français et qu’ils doivent rejoindre la Légion étrangère… Et puis il y a ces dizaines de volontaires qui peuvent s’enrôler pour la durée de la guerre – les fameux EVDG – sans avoir l’âge requis.

A une époque où la majorité était fixée à 21 ans, il était possible de s’engager à moins de 18 ans révolus, à condition de justifier d’une autorisation parentale – mais, quoi qu’il en soit, en ayant au moins 17 ans. Toutefois, cette condition ne sera pas toujours respectée – c’est un euphémisme - dans cette atmosphère de Libération où des adolescents souhaiteront, coûte que coûte, et pour diverses raisons (le patriotisme, bien sûr, mais également, pour certains, des problèmes familiaux), suivre au combat leurs copains du maquis. Ce qui explique la présence de soldats de 16 voire 15 ans dans ces unités.

Parmi ces «Bara» de l’an 1944, dont l’histoire sera portée à l’écran par le metteur en scène Claude Pinoteau (lui-même ancien FFI) dans «La neige et le feu», il est un nom, pour peu que l’on s’intéresse à cette période, un peu plus connu que les autres : celui de Serge Gras. Né à Lyon le 10 février 1929, il n’a donc pas 16 ans lorsqu’il sert au 151e régiment d’infanterie (ex-Brigade Fabien). S’il est devenu fameux, c’est grâce à une célèbre photo immortalisant, lors d’une prise d’armes, la rencontre de l’adolescent avec le général de Lattre (dont le fils Bernard a été autorisé lui-même à servir au 2e dragons à l'âge de 16 ans). Quelques jours plus tard, le 12 avril 1945, Serge Gras tombera lors des combats en Allemagne…

Des «Serge Gras», l’histoire de l’armée française issue des unités FFI en a connus d’autres. Beaucoup, d’ailleurs, n’étaient plus en vie pour fêter la Victoire. En voici une liste, non exhaustive, selon nos informations, enrichies par la consultation du site «Mémoire des hommes» du ministère de la Défense (sous réserve qu'il n'y ait pas d'erreur dans les dates de naissance) :
. comme Serge Gras, Marcel Lepage appartenait au 151e RI, et comme lui, il est tombé en Allemagne : né le 15 janvier 1929 à Genteley (Seine), il est mort en effet le 7 avril 1945 à Wiesenthal. A noter que selon une étude consacrée à la colonne Fabien, 19 % de ses hommes (un cinquième !) auraient été âgés entre 15 et 18 ans !
. Claude Berçot, né le 19 juin 1928 à Mathay (Doubs), soldat au I/152e RI, tombe le 26 novembre 1944 près de Courtelevant à 16 ans et six mois.
. Robert Creux, de Saint-Dizier (21e RIC), voit le jour le 18 janvier 1929. En s’engageant à Chaumont, il fait jurer à ses camarades de ne pas révéler son âge véritable, mentant à son père (« Je suis de la classe », osera-t-il écrire !), trompant ses chefs. Un secret qui sera éventé en décembre 1944, ce qui n’empêchera pas le brave soldat Creux de poursuivre les opérations de son bataillon et de mourir en héros à Wittenheim quelques jours après son 16e anniversaire. A noter que dans le seul 21e RIC, nombre de volontaires n’avaient pas 18 ans, ainsi Bernard Pascucci, blessé en Alsace au lendemain de ses 17 ans.
. Manuel Soler, considéré comme le benjamin de la Brigade légère du Languedoc, est tué à Village-Neuf le 30 novembre 1944. Il était né le 16 avril 1928 à Salmiech (Averyon).
. au 23e RIC, pas moins de trois soldats nés en 1929, donc âgés de 15 ans en 1944, ont trouvé la mort lors de la campagne : Jacques Blot, né à Paris le 31 janvier 1929, tué le 30 janvier 1945 en Alsace (à la veille de ses 16 ans !) ; Lucien Renaud, né le 28 août 1929 à la Cluze et Mijoux, tué le 7 avril 1945 en Allemagne ; René Gresse, né en janvier 1929 à Valence (Drôme), tué le 20 janvier 1945 dans l’agglomération de Mulhouse ;
. Louis Legardeur, né en décembre 1926 à Souilly (Meuse), n’a pas 18 ans lorsqu’il est sergent au Bataillon (FTP) de la Meuse et qu’il tombe le 27 septembre 1944 en Lorraine.
. René Capdeville, né le 9 février 1929 à Carcassonne, soldat au 81e RI, meurt le 14 avril 1945 à Karlshruhe.
. Albert Plantier, né le 23 juin 1929 à Villette (Isère), du 11e cuirassiers, tombe le 23 octobre 1944 à Rupt-sur-Moselle à 15 ans et cinq mois !
. Maurice Deflandre, né le 2 mars 1929 à Mouzon (Ardennes), du 67e RI, décède à La Baule en septembre 1945 des suites de blessures.
. l’excellent ouvrage de Gilles Hennequin, « Le régiment de Bourgogne et ses 2 150 FFI côte-d’oriens volontaires » (2006), cite le cas de Gilbert Paquet, 16 ans, de Dijon, tué le 18 novembre 1944 – effectivement, Paquet est né le 4 août 1928 dans la capitale bourguignonne et meurt à Chagny à 16 ans et trois mois.

Citons encore, grâce à des articles parus dans la publication de l’association Rhin-et-Danube (notices nécrologiques, remises de médailles, témoignages…), les noms des volontaires suivants :
. Georges Liggi, né le 25 mars 1929, accueilli le 30 août 1944 par le groupe des Commandos d’Afrique. Ce n’est qu’en août 1945, après la capitulation nazie, que son véritable état civil a été découvert ;
. Léon Nabet, né en 1929 à Constantine, engagé à 14 ans en Afrique du Nord, qui sert dans la 2e DB ;
. Maurice Plestin, né le 25 mars 1928, engagé le 1er septembre 1944 au 23e RIC à 16 ans et six mois ;
. le volontaire J. M. Grosjean, né à Belfort, engagé à 16 ans au 4e bataillon de choc ;
. Maurice Blondel, enrôlé à 16 ans au 7e bataillon de marche de Normandie, passé au 23e RIC ;
. Robert Pan, du bataillon du Charollais, enrôlé à 16 ans et demi ; etc.

Toute information supplémentaire au sujet de ces « Bara » de 1944 est évidemment la bienvenue.
Copyright Club Mémoires 52

samedi 16 avril 2011

Les volontaires franc-comtois

1er régiment de Franche-Comté. Chef : lieutenant-colonel Sarrazac-Soulage (« Lagarde ») puis lieutenant-colonel Albert Sarda du Caumont (« Rosette »). Organisation : 1er bataillon (1er groupe d’escadron du Jura) : capitaine Pierre Patoor, enseignant au collège de Salins-les-Bains. 2e bataillon : commandant Edouard Filarder (« Duchêne »), futur général. 3e bataillon : capitaine Puccinelli (« Ponthieu ») puis commandant Chennevier puis capitaine Ravereau ("Franck"). Mis sur pied au Valdahon (Doubs). 10 septembre 1944 : le I/RFC, de Salins-les-Bains (Jura), est rattaché à la 3e DIA avec laquelle il opère dans les Vosges. 12 octobre : le régiment est rattaché à la 5e DB, hormis le 1er bataillon qui reste attaché aux spahis algériens de reconnaissance. 19 novembre : le 1er escadron (ou 2e compagnie, capitaine Billet) du I/1er RFC entre dans Gerardmer. Le 21, des éléments occupent le col de la Grosse-Pierre. 3 décembre : le I/RFC fait 43 prisonniers au Hohneck, où il a occupé l’hôtel éponyme et repoussé une contre-attaque. Au 6, relevé par le I/4e RTT, le RFC aura perdu deux tués, trois disparus, trois blessés. Compte 1 288 hommes au 31 décembre. 15 février 1945 : mis à la disposition de la 2e DIM, il est intégré dans le 27e RI, formant les noyaux et I et II/27e et les unités régimentaires. Note : le 10 décembre 1944, le "bataillon de renfort de Saint-Etienne" (capitaine Ravereau) rejoint le régiment et devient III/1er RFC.

Groupement du Lomont. Importante formation FFI sous les ordres du commandant américain « Paul » qui tient le plateau et le fort du Lomont jusqu’à la liaison avec l’armée B le 6 septembre 1944. Il comprend les unités suivantes :

. 4e bataillon du Lomont. Rattaché à la 9e DIC. Participe à l’offensive de la boucle du Doubs : le 18 novembre 1944, il est à Mandeure.

. 5e bataillon du Lomont. Rattaché à la 5e DB.

. 6e bataillon du Lomont. Chef : commandant Harnisch. Ex-3e bataillon. La 1ère compagnie occupe Courcelles le 18 novembre 1944.

Ce Régiment du Lomont, constitué de trois bataillons, totalise 1 096 hommes au 15 février 1945. Dissous le 31 mars 1945, il forme le I/121e RI le lendemain.

Les FFI du Lomont forment également la compagnie du capitaine Sartout, qui a intégré les FFI du corps-franc « Tito » (lieutenant Henri Bourlier). Cette unité donne naissance, le 14 octobre 1944, au groupe d’escadrons portés du RICM.


7e bataillon de marche du Doubs. Intègre la 16e compagnie du Lomont. Devient I/60e RI en février 1945.

1er bataillon de marche de la Haute-Saône. Chef : commandant Pierre Bertin (« Bermont »), capitaine d’active, chef départemental FFI de la Haute-Saône. Créé comme bataillon de marche n°9 le 20 octobre 1944, totalisant 670 hommes. La compagnie de commandement est aux ordres du capitaine Le Danois, les compagnies sont respectivement commandées par les capitaines Boigey, Miaille, Menigoz, Reuchet et Jarrot. Positionné le 12 novembre dans le Doubs pour assurer la garde de la ligne Paris-Besançon. A Noël, part à la chasse d’éventuels parachutistes allemands. Devient 1er bataillon de marche de la Haute-Saône le 1er janvier 1945. Part quelques jours plus tard relever le 8e bataillon de Saône-et-Loire dans ses missions de garde de la frontière suisse. Devient II/ 60e RI le 1er février.

1er bataillon du Jura. Chef : commandant Le Henry, chef de l’Armée secrète du Jura. Après la libération de Lons-le-Saunier, rejoint la 4e demi-brigade alpine. Devient I/159e RI mi-décembre 1944.