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| Des FFI du I/51e RI dans les Vosges. Photo issue de l'ouvrage de Pierre Alquier. |
Chef de corps : lieutenant-colonel René Trioche
Organisation :
. 1er bataillon, commandant Henri Pugnaire (blessé 18/10/1944) puis commandant Jean Martrou
. 2e bataillon, commandant François Vittori (Marc).
A l'origine, le lieutenant-colonel René Trioche, ancien officier du 51e RI de l'Armée d'armistice à Albi (tout comme son adjoint, le commandant Edmond Dupuy, mais également Pugnaire et Martrou), commande la 1ère demi-brigade (du Tarn) de la Division légère de Toulouse. Elle se compose initialement de trois bataillons : le Bataillon de l'Albigeois (ORA du Tarn), qui a repris les traditions du I/51e RI, le Bataillon du Rouergue (FTP de l'Aveyron) et le Bataillon Antoine (groupes Vény du Tarn). Ce dernier ne combat pas en corps constitué au sein de la 1ère armée française, à la différence des deux autres bataillons.
1er bataillon du 51e RI
Effectifs : 20 officiers et 407 sous-officiers et hommes de troupe. « Les hommes sont des jeunes engagés, en majorité étudiants, note le général Guillaume, commandant la 3e division d'infanterie algérienne. L'instruction qu'ils ont reçue est rudimentaire : un peu d'école de groupe et de maniement d'armes. » Particularité de sa 3e compagnie (capitaine Lucien Rabaséda) : elle est composée de gardes d'un escadron de marche formé après la dissolution des escadrons 3/6, 7/6 et 8/6. La 2e compagnie est commandée par le capitaine Emile Arino, qui n'a que 21 ans. Ce dernier était, sous le pseudonyme de Daniel, le chef du maquis Stalingrad, d'où le nom de Compagnie Stalingrad de l'unité.
Ayant défilé à Dijon le 15 octobre 1944, le I/51e RI est mis à disposition du 2e régiment de spahis algériens de reconnaissance (RSAR), dans les Vosges, le 18 octobre 1944. Ce jour-là, son chef, Pugnaire, est blessé aux jambes par des éclats d'obus en arrivant à Saulxures-sur-Moselotte. Un autre ancien officier du 51e RI, le commandant Martrou, lui succède. Sous ses ordres, le bataillon relève, le 19 octobre 1944, le bataillon Bénony du Corps franc Pommiès dans le quartier de La Forge-Julienrupt, sur l'axe Remiremont - Gérardmer, devant Le Tholy. Le 24 octobre 1944, il déplore la mort du soldat Jacques Magnier, au Syndicat. Puis, le 28 octobre 1944, il perd le soldat Roger Calmet, tué par l'obus d'un char Tiger posté en bas du Tholy (l'adjudant Richard, le sergent-chef Thibault, le sergent Mauriès et le caporal Jaïs sont blessés). Nouvelles pertes le 4 novembre 1944, lors d'une reconnaissance sur une crête par une patrouille qui est accrochée par une mitrailleuse (le sergent-chef Paul Busig, les sergents Thibault et Mayer sont blessés). Relevé dans le quartier de La Forge le 7 novembre 1944 et dans la nuit du 7 au 8 par le 1er Bataillon de Toulouse (ex-2e demi-brigade Ajax), le bataillon part cantonner au Roulier et à Saint-Loup-sur-Semouse.
Depuis le 27 octobre 1944, le I/51e RI compte une nouvelle 3e compagnie confiée au capitaine Max Rouch et provenant de la Demi-brigade Ajax (cette unité succède, dans l'ordre de bataille du bataillon, à l'ancien escadron de marche de gardes du capitaine Rabaséda, qui rentre à Toulouse).
Le I/51e RI, également appelé Bataillon de l'Albigeois, remonte en ligne le 19 novembre 1944, entre Cornimont et Xoulces, en relevant des militaires du 2e Bataillon de la Légion étrangère. Le 22 novembre 1944, deux sections de la 1ère compagnie (capitaine Guy Maraval de Bonnery), qui ont été accrochées, perdent un homme lors du repli : Georges Senegas, tué à Xoulces. Le 25 novembre 1944, le sergent Jean Salviani, dont le frère Charles sert également dans le régiment, est tué par l'explosion d'une mine au cours d'une liaison. Puis le bataillon reçoit, le 26 novembre 1944, l'ordre de se porter sur le col du Brabant, au sein d'un sous-groupement composé du II/1er Régiment de Franche-Comté et d'éléments du 7e régiment de chasseurs d'Afrique. Parti de Xoulces, il parvient au col. Le lendemain, il reprend la progression en direction du Bramont, mais rencontre de nombreuses difficultés. « La colonne Trioche qui s'était emparée de la bordure des bois de la Roche des Bouchaux est vigoureusement contre-attaquée et revient sur ses positions de départ après avoir subi des pertes sensibles », note le journal du II/RFC. En début d'après-midi, en effet, la 3e compagnie a notamment perdu, près de la ferme des Corbeaux, le sergent Jean Miquel et Pierre Marty. Le I/51e RI déplore également, ce 27 novembre 1944, près de Cornimont, la mort de Georges Bassot, du sergent Léon Florczak et de Jean Gauthier. Ce sont la compagnie Monnet et le corps-franc du RFC, installés dans la zone de la chapelle, qui couvrent le repli du I/51e RI, lequel retourne le soir à Cornimont.
Parvenu au col du Bramont le 5 décembre 1944, le I/51e RI reste en ligne dans le secteur de La Bresse. Le 18 janvier 1945, conduits par le capitaine Maraval et le lieutenant Rio, neuf hommes de la 3e section (adjudant-chef Canès), 1ère compagnie, partent en patrouille en direction du lieu-dit Rothenbach, au Rainkopf, commune de La Bresse. L'explosion d'une grenade provoque la réaction, au panzerfaust, au mortier, à la mitrailleuse, de l'ennemi. Adrien Pistre, 20 ans, et Jean Roumiguieres, 21 ans, sont tués, Raymond Carausse est grièvement blessé par une balle explosive, Henri Cougoureux est touché par une grenade. Les cinq rescapés parviennent à se replier - le corps de Roumiguieres ne sera découvert que le 21 avril 1945. Le 3 février 1945, lorsque le secteur des Vosges se met en mouvement dans le cadre des opérations de réduction de la Poche de Colmar, le I/51e RI, dont une patrouille dans la nuit a confirmé le décrochage des Allemands, atteint le Rothenbachkopf. Quelques semaines plus tard, le bataillon, qui ne compte plus que quinze officiers et 299 hommes au 16 février 1945, est dissous. Une partie des hommes rejoignent le Sud-Ouest où le 18e RI se reconstitue (le commandant Pugnaire, le capitaine Maraval y serviront), tandis que leurs camarades sont affectés le 26 février 1945 au 49e RI né de la transformation du Corps franc Pommiès. C'est avec ce régiment que les Albigeois prennent part à la Campagne d'Allemagne.
2e bataillon du 51e RI
Dit Bataillon du Rouergue ou 1er Bataillon de l'Aveyron (à ne pas pas confondre avec le 1er Bataillon de l'Aveyron de la Brigade légère du Languedoc) ou Bataillon Marc. Recruté dans la région de Decazeville (Aveyron), il a conservé son organisation typiquement FTP. Ainsi, son chef Marc est notamment secondé par un « commissaire aux effectifs », le capitaine Lucien Aussenac (Dorin), et ses compagnies seront longtemps numérotées 4 201, 4 206 et 4 209. Parti d'Albi le 5 septembre 1944, puis de Rodez le surlendemain, le bataillon cantonne durant plus d'un mois à Saint-Appolinaire, près de Dijon, où les contrats d'engagement pour la durée de la guerre ont été signés, avant de se porter le 16 octobre 1944 sur Rupt-sur-Moselle. Ce jour-là, il est en position au Syndicat et à Vagney. Relevé le 26 octobre 1944 par le groupe d'escadrons d'Audibert du 3e dragons à Moyenmont et Dramont, il reprend le lendemain les positions du 3e bataillon de la Demi-brigade d'Auvergne.
Le 31 octobre 1944, le II/51e RI est lancé au combat. Un de ses officiers, le sous-lieutenant Michelet, de la 4201e compagnie (capitaine Raymond Comte, dit Crémieux), est blessé à la jambe droite. Le 3 novembre 1944, il prend part à la tentative de progression sur Rochesson, avec le 3e dragons. A 12 h 45, le chef d'escadrons d'Audibert rend compte que le bataillon de l'Aveyron, qui progresse par le Grisard, a atteint la cote 650 avant d'aller occuper 821. Puis, « à 16 h 15, rapporte le JMO du 2e RSAR, le Bataillon Marc ayant réussi à pousser un élément jusqu'à 300 m au sud du Haut de Bouvacôte, le lieutenant-colonel Trioche reçoit l'ordre de reconnaître et d'occuper avant la tombée de la nuit la cote 733. Il y parviendra sans difficultés. »
Le 14 novembre 1944, jour où le IIe Corps lance son offensive dans le Doubs, le bataillon du commandant Vittori, qui opère avec le 1er Bataillon de Toulouse, atteint les pentes Nord du Haut de Bouvacôte (cote 816). Le lendemain, le 2e RSAR et les FFI venus de Berlingoutte entrent enfin dans Le Tholy, puis arrivent dans l'après-midi au carrefour de Préchamp où la liaison est réalisée avec les Américains. Ce jour-là, le bataillon du commandant Marc vit une tragédie : en se portant en avant, des FTP « sont reçus par plusieurs salves de FM ou de mitrailleuses qui blessent deux de nos gars, dont un assez grièvement... Il a été atteint par une balle explosive dans la région du ventre ; ces coups de feu sont tirés par le bataillon Ajax [1er Bataillon de Toulouse] ; nos gars se font aussitôt reconnaître et le feu cesse immédiatement. » Il y aura un autre drame, plus cruel encore. Quatre volontaires étaient partis en reconnaissance, lorsqu'au lieu-dit Goutte des fromages (commune du Tholy), ils se sont heurtés à des soldats allemands. Il y a trois tués : Benjamin Fargues, Louis Hernandez et le sergent André Glarey, mort des suites de ses blessures le 16 novembre 1944 à Remiremont. Le quatrième FTP, « voyant ses camarades tomber, tire à son tour et blesse ou tue deux boches, puis il se barricade à l'intérieur » de la maison « et se défend très courageusement jusqu'à l'arrivée d'une compagnie d'Ajax qui met l'ennemi en déroute ». Ainsi, « cette journée, qui devait être pour notre bataillon une journée de joie, se termine dans le deuil », note le journal des marches de l'unité. Le lendemain, le bataillon aveyronnais est retiré du front pour se reposer à Corbenay...
Au repos pendant douze jours, le 1er bataillon de l'Aveyron remonte en ligne le 30 novembre 1944. Ses 4 201e et 4 206e compagnies relèvent les hommes du 1er RFC éprouvés par le combat du bois de la Roche de Bouchaux. Le PC du bataillon est établi à Lansauchamp. Alors que deux hommes ont été blessés dans la journée en sautant sur une mine (Raymond Lecole a reçu huit éclats à l'épaule, à la cuisse, au mollet gauche, aux chevilles et au talon gauche), une patrouille de la 4 201e compagnie conduite par le sous-lieutenant Maximilien Lubecki est lancée dans la nuit, avec l'objectif, dans la mesure du possible, de faire des prisonniers. Mais, victime d'une balle en plein front dans une rencontre avec l'ennemi « à environ un kilomètre de nos lignes », le jeune officier de 19 ans devait perdre la vie, dans la forêt, comme le sergent Luciano Bartoletti. Antoine Gonzales, dit Michaud, « veut essayer de ramener les cadavres de ses camarades, mais il tombe à son tour victime de son devoir », note le JMO du bataillon, qui signale aussi que René Boyer, porté disparu, parviendra à rejoindre son unité. C'est le capitaine Eugène Pilate (Félix) qui, avec d'autres Aveyronnais, ira rechercher le lendemain les trois corps.
Le 4 décembre 1944, entre La Bresse, en Lorraine, et Wildenstein, en Alsace, le II/51e RI vit « une journée toute améliorée de gloire ». Il avait reçu l'ordre de pousser en direction du col de Bramont et du lac des Corbeaux : « La 4 201e compagnie, en particulier, étant parvenue la veille au col de la Vierge, partit dès le matin pour prendre le col... Elle y parvint vers la fin de la matinée, et cette marche surprit tellement l'ennemi qu'on trouva dans une maison les pommes de terre cuisant au feu et abandonnées par les boches en déroute. Suivie peu après par la 4 206e, puis par la 4 209e, elle arrive même à la frontière alsacienne et sur la route nationale. »
Puis, comme les camarades du I/51e RI, les FTP du II/51e vont tenir position. Le 21 décembre 1944, le capitaine René Schiltz (Debussy), commandant la 4 206e compagnie, meurt accidentellement dans le secteur de Rainkopf, lors de la relève par la 4 209e compagnie. Le bataillon est alors implanté sur la piste des Italiens et au poste Riquet notamment, à proximité du col de Bramont. Le 26 décembre 1944, Ernest Vabre est tué au Rainkopf.
Le 3 février 1945, des patrouilles du 1er Bataillon de l'Aveyron se mettent en mouvement à 7 h 30 « et arrivent à hauteur du poste allemand au point 2.891 où elles constatent que l'ennemi s'est replié. Voyant que les bruits selon lesquels les Allemands commençaient à retirer leurs troupes du secteur se justifiaient, nos hommes, malgré les difficultés à marcher sur l'épaisseur de neige, reprennent courage et résolument foncent à l'avant. En peu de temps, la route des crêtes est atteinte et occupée immédiatement. Le Rainkopf à son tour est atteint et l'auberge du Rothenbach, première étape, est occupée aussi». C'est là que le sous lieutenant Simon échappe à la mort quand un engin piégé explose à l'intérieur. Dans l'après-midi, partant du point d'appui Riquet où le commandant Vittori a établi son PC, « une section de la 2e compagnie, parmi laquelle se trouvent le capitaine Roux et le sous-lieutenant Montpellier, part en direction du refuge du Rainkopf en suivant la route des crêtes. Arrivée à la hauteur du lac de Blanchemer, ils sont durement pris à partie par plusieurs mitrailleuses allemandes qui avaient encore les postes sur le flanc Est du Rainkopf. Aussitôt la première rafale, le sergent Naves Robert, dit Julien, s'affaisse, touché à la tête. La patrouille se replie sur Blanchemer où, une fois de plus, elle est prise sous le feu d'éléments isolés à Abri-Fer. Une deuxième patrouille, partie sur les pas de la première, est aussi accrochée à son tour. Le caporal-chef Lefevre est blessé par une balle à la cuisse. » Agé de 18 ans, Robert Naves, qui avait été retrouvé par des éclaireurs skieurs du RFC « après avoir passé une nuit par un froid terrible à 50 m d'un blockhaus ennemi », décède le 10 février 1945 à Besançon.
Le 7 février 1945, les I et II/51e RI descendent des crêtes, passent à Metzeral et vont cantonner à Sondernach. Tandis que le 1er bataillon est versé au 49e RI, le 2e, qui regroupe 20 officiers et 434 hommes au 16 février 1945, est affecté le 21 février 1945 au 3e bataillon du 151e RI (ex-Brigade de Paris), bataillon dont Vittori prend le commandement avant de le céder au capitaine de Linarès. Les Aveyronnais du III/151e RI se couvrent ensuite de gloire en Allemagne.
Le 51e RI (du Tarn et de l'Aveyron) avait cessé de vivre. Mais le régiment avait été reconstitué, devant Dunkerque, à compter du 24 janvier 1945, avec des volontaires du Nord.
Sources : archives du bataillon de l'Albigeois, GR 13 P 69, SHD - archives du Bataillon Marc, GR 13 P 82, SHD - archives de la demi-brigade Trioche, GR 13 P 93, SHD - archives du 51e RI, GR 12 P 12, SHD - Pierre Alquier, Le I/51e RI (FFI) ou Bataillon de l'Albigeois. Les jeunes volontaires de la Libération, 1993.

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