En 1944-45, jamais, depuis la Révolution, autant d'unités de l'armée française n'avaient été confiées à des officiers aussi jeunes.
Des hommes dont certains ne bénéficiaient d'aucune formation militaire ont été amenés à prendre d'importantes responsabilités, non seulement dans la Résistance, mais aussi dans les unités issues des maquis, puis dans celles qui ont été intégrées dans l'armée « régulière ». Ainsi, au moins trois régiments d'infanterie métropolitaine étaient commandés, au moment de la capitulation nazie, par de jeunes chefs de corps venus de la Résistance. C'est le cas du 50e régiment d'infanterie (RI), engagé dans les combats de Royan et de l'île d'Oléron, dont le lieutenant-colonel, Rodolphe Cézard, alias « Rac », n'était âgé que de 28 ans, et n'était, quatre ans plus tôt, que lieutenant d'artillerie. C'est le cas aussi du 126e RI du colonel Louis Godefroy, Compagnon de la Libération de 33 ans, qui n'était même pas sous-officier en 1940 ! C'est le cas encore du 8e RI (ex-2e régiment d'infanterie du Lot puis 154e régiment du génie), qui avait pour lieutenant-colonel Robert Noireau, dit « Georges », 32 ans, lui aussi futur Compagnon de la Libération, et seulement travailleur militaire en 1940.
Dans les unités FFI, il y eut des officiers supérieurs particulièrement jeunes. Qu'il suffise de citer l'exemple du 1er régiment du Morvan dont deux des quatre chefs de bataillons avaient tout juste 20 ans : Jean Chapelle, alias « Verneuil », et Roland Champenier (tué sur le front en novembre 1944) ! Et au sein de la 6e brigade (FTP) de Dordogne, un régiment était confié à un commandant de 24 ans, René Coustellier, alias « Soleil », qui, à la fin de la guerre, sera à la tête du 3e bataillon du 108e RI, et dont un bataillon avait pour chef un capitaine de 17 ans, son beau-frère René Dessalien, alias « Rase-Motte » ! Il va sans dire qu'aucun de ces officiers ne justifiait d'une expérience militaire !
Ce qui n'est pas le cas du commandant Roland Clée, alias « Roland », 24 ans, chef d'un bataillon FFI de Dordogne puis du 2e bataillon du 50e RI, qui paraît avoir été officier d'active. D'un autre officier supérieur de ce régiment, le commandant René Tallet, dit « Violette », 25 ans, qui était pilote dans l'armée de l'air. Du commandant Raymond Belmont, dit « Martin », 26 ans, sous-lieutenant en 1940, chef du 2e bataillon du 13e RI. Ou du lieutenant-colonel Jean-Pierre de Lassus-Saint-Geniès, 30 ans, Saint-Cyrien, officier en 1940, chef de la 2e demi-brigade alpine puis, semble-t-il, devenu chef de bataillon au 159e RIA.
Toutefois, d'autres officiers supérieurs ne resteront pas longtemps à la tête d'une unité, notamment au sein de la 1ère armée française. Ainsi, lui-même successeur de l'illustre colonel « Fabien » (Pierre Georges), tué à l'âge de 25 ans en Alsace, le colonel Claude Jaeger, dit « Michelin », 27 ans, ne restera que quelques semaines chef de corps du 151e RI issu de la 1ère brigade de Paris, avant de céder le commandement à un officier d'active, le lieutenant-colonel Paul Gandoët. Officier de 35 ans, le colonel Gilbert de Chambrun, alias « Carel », ne conservera pas non plus le commandement du 81e RI, confié au lieutenant-colonel Gauvin venu de la 9e DIC. Même dans l'intérieur, le chef de bataillon Frédéric Remélius, dit « Noël », 32 ans, laissera, en janvier 1945, le 3e bataillon du 26e RI (futur I/150e RI) à un officier d'active, le commandant Blangenois.
A noter que la 27e division alpine paraît être la grande unité issue de la Résistance dont les chefs de corps étaient les plus jeunes. Parmi ses six bataillons de chasseurs alpins (BCA), le chef de bataillon Roland Costa de Beauregard, dit « Durieu », commandant le bataillon Vercors puis le 6e BCA, futur général, n'avait que 31 ans ; le chef de bataillon Yves Godard, du 27e BCA, 32 ans ; les chefs de bataillon Georges Héritier, commandant le bataillon Savoie puis le 13e BCA, futur général lui aussi, et Lecoanet (15e BCA), 34 ans...
Parmi d'autres jeunes officiers supérieurs, signalons, parmi les volontaires de l'ex-Région 3, les commandants Bernard Bonnafous, dit « Richard », 26 ans, adjoint au chef de corps de la Brigade légère du Languedoc, et Michel Bruguier, dit « Audibert », 23 ans, chef du Bataillon du Gard.
vendredi 10 mai 2013
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