(Photo L. Fontaine).
3 décembre 1944. Eprouvé par les combats livrés l'avant-veille, le Régiment de marche Corrèze-Limousin est relevé. Par le Commando de Cluny, jusque-là cantonné dans l'agglomération de Belfort. Mis à disposition du 3e régiment de spahis marocains, les volontaires de Saône-et-Loire se portent, au matin, jusqu'à la désormais fameuse cote 475. Leur mission : en conquérir le sommet dans l'après-midi, appuyés sur leur gauche par le Détachement d'appui du régiment de reconnaissance, ainsi que par un peloton de tank-destroyers. L'heure H est fixée à 15 h 05. C'est la 1ère compagnie du capitaine du Chaffaut, et la section Paffoy de la 3e compagnie, qui se lancent à l'assaut. Mais les pertes vont être lourdes, à cause des obus de mortier et des mines. Les sergents Pierre Grard et Bernard Legrand, le caporal-chef Claude Boutillon, Fernand Halftermayer, Jean Witte sont tués. Le sergent-chef Gabriel Rollin, grièvement blessé par une balle explosive, mourra le lendemain. Les Commandos, qui ont perdu également Robert Zahmer, qui n'a que 17 ans, et Aimé Ferry, n'ont d'autre solution que de se replier. 475 reste aux mains des Allemands...
C'est quatre jours plus tard, le 7 décembre 1944, dans le cadre de l'action de la 2e DIM contre Thann, qu'une nouvelle tentative est lancée contre la cote, avec pour objectif immédiat la conquête de Roderen. Pour le Groupe de commandos du 2e corps, la tâche s'annonce rude. Pour prendre la localité, le commandant Georges Vigan-Braquet dispose de ses deux «commandos» (compagnies), du corps-franc d'Indre-et-Loire et des deux compagnies du 1er bataillon du Charollais.
Du côté des hommes du Charollais, arrivés à Bourbach-le-Bas la veille, c'est la 2e compagnie du lieutenant Jean du Sordet, appuyée par un peloton du 3e RSM, qui a le redoutable honneur de conduire l'attaque. Elle vient de passer une nuit «assez froide (…) au milieu de la pente dénudée qui domine la cote 475», peut-on lire dans l'historique du bataillon. L'attaque sera lancée à 9 h 20, après dix minutes de préparation d'artillerie. Mais comme pour leurs compatriotes de Cluny quatre jours plus tôt, les mines disposées par les Allemands sont meurtrières, particulièrement pour la section du lieutenant Danard. Un brancardier, Georges Micollot, est blessé. Si la section de l'adjudant-chef Gauthey peut occuper le calvaire, qui domine la cote, au bord de la route, les tirs ennemis alourdissent les pertes des volontaires qui ont pris position dans le bois voisin. L'aspirant Fillière est touché. Ordre est donné, en milieu d'après-midi, de rester sur la défensive, en attendant l'arrivée de la 1ère compagnie. Mais au moment où le lieutenant Antoine d'Anterroches, qui la commande, et le sous-lieutenant Victor Remmel, officier de renseignements du bataillon, partent en reconnaissance, les Allemands lancent à 16 h 30 une contre-attaque – victimes d'une mine, les deux officiers sont tués. La position devient intenable pour les hommes du lieutenant du Sordet, qui doivent se replier jusqu'à la cote 475, perdant encore quelques hommes sur le champ de mines. L'ennemi parvient à la crête, mais le corps-franc d'Indre-et-Loire le stoppe. Roderen n'est pas tombé, mais la cote 475 est enfin aux mains du Groupe Vigan-Braquet. Ses compagnies du Charollais auront perdu dix tués : outre les deux officiers, il s'agit du sergent Roger Aupoil, de Jacques Paliard, Maurice Kaiser, Jean Didier, Jean Baucher, Michel Pourtales (17 ans), Emile Legros et Elie Gandit. Dans les autres composantes du groupe de commandos, le sergent-chef Jean Brillat-Savarin, les soldats Gilbert Clément (17 ans) et Jacques Navarro ont également été tués.
Pour le bataillon du Charollais, c'est une nouvelle nuit qui sera passée dans des trous « pleins d'eau, aucun abri le long de cette pente exposée au vent glacial qui remonte la vallée », note l'historique du bataillon. Une nuit et une journée « sous une pluie glacée qui durera plus de quinze heures (…) qu'aucun de ceux qui les connurent n'oubliera de sa vie », confirme le commandant Vigan-Braquet.
Non loin de là, si les tirailleurs et les hommes du Régiment de Bourgogne qui les accompagnent sont parvenus à prendre Bitschwiller-lès-Thann, l'assaut de Michelbach, pour le 1er régiment de volontaires de l'Yonne, s'est avéré un échec sanglant : une vingtaine de tués, dont le chef de bataillon Charpy et le lieutenant Moïse Flottet. Du côté du Commando de Cluny, également engagé ce 7 décembre 1944, il a pu entrer dans Rammersmatt, après avoir perdu Louis Igier et Pierre Laurençon. Mais sa 2e compagnie du capitaine Jean Prost n'a pu reprendre le Kurrenbourg, déplorant la mort du sergent Roger Jouveneau, de Raymond Bellesme, André Brailly (17 ans), Alfred Cremon, Henri Genot.
Au moins 40 tués, parmi les volontaires de l'Yonne, du Charollais, de Cluny et du Gard : le bilan est terrible pour les unités FFI qui appuyaient la 2e DIM. En forêt près de Michelbach, ou sur la cote 475, des monuments leur rendent hommage.
Sources : "Le maquis de Beaubery et le Bataillon du Charollais" ; "Si t'y crains t'es foutu", Victor Loizillon ; "Le Régiment de Bourgogne", Gilles Hennequin ; historique du 20e bataillon de chasseurs alpins, lieutenant-colonel Vigan-Braquet, Service historique de la Défense ; Mémoires des hommes.
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